OU SE JOUE DONC L'AVENIR de la formation médicale continue (FMC) ?
Dans les trois conseils nationaux chargés d'en établir les nouvelles règles ou dans les milliers d'associations de formation que compte l'Hexagone ?
Le Dr Philippe Bonet, vice-président du Conseil national de formation médicale continue (Cnfmc) des médecins libéraux, précisait dès l'installation des conseils, en février : « Il nous faudra respecter les associations de terrain qui ont continué à former des médecins depuis plusieurs années et profiter de leur expérience pour établir des règles claires et lisibles. »
Gelé depuis 1997, le dispositif institutionnel se remet lentement en route. Dans les prochaines semaines, en juillet, les Cnfmc des médecins libéraux, salariés et hospitaliers, doivent remettre un rapport au ministre de la Santé. Ils indiqueront quels critères d'agrément des associations de formation, quelles mesures d'incitation ou d'évaluation ou encore quelles modalités de financement ils souhaitent mettre en place.
Prise de conscience.
Sur le terrain, les associations de FMC sont pourtant opérationnelles depuis longtemps. Et ce n'est pas ce blocage institutionnel qui les a empêchées d'accomplir des sessions de formation. « L'obligation de la FMC en 1996, affirmée à l'époque par les ordonnances Juppé, a déclenché une prise de conscience chez les médecins et pendant que les associations de formation se développaient, divers conseils nationaux de FMC se succédaient sans durer », affirme le Dr Isabelle de Béco, présidente de la Société de formation thérapeutique du généraliste (Sftg), une association qui affiche son indépendance vis-à-vis des institutions et des investisseurs privés.
Dans la salle d'attente.
Le Dr Béco organise régulièrement des réunions de FMC. Comme ce mardi soir où, à 21 heures, sa vaste salle d'attente affiche complet. Ce ne sont pas des patients qui l'occupent mais bien une vingtaine de médecins généralistes des 11e et 20e arrondissements de Paris. Ils forment un grand cercle à l'intérieur duquel circulent cacahuètes et olives. L'ambiance est détendue, mais les médecins ne sont pas venus pour un apéritif.
Au menu de la soirée organisée par la Sftg, une séance consacrée au saturnisme et aux pathologies de l'hémoglobine. Chaque participant a en main une liste de cas pratiques sur lesquels il va plancher pendant près de deux heures. Le médecin qui organise la séance a travaillé pendant dix ans à Médecins du Monde, et connaît bien le thème. Dans son discours introductif, il évoque les 85 000 enfants de 1 à 5 ans qui sont intoxiqués chaque année et la très faible détection des cas par les médecins généralistes. Les uns après les autres, les médecins lisent un cas clinique, posent des questions, parlent d'expériences vécues. Ainsi se déroule la soirée, riche en échanges, sous la houlette d'un expert venu bénévolement.
Cependant, une question restera sans réponse. Elle concerne la vie institutionnelle de la formation médicale. Hormis le Dr de Béco, personne ne connaît l'existence des trois Cnfmc ni leur rôle.
A l'hôpital de Créteil.
Autre réunion. Celle organisée à l'hôpital intercommunal de Créteil. Plus de 80 médecins ont fait le déplacement à l'invitation de l'association locale de l'Union nationale de formation médicale continue des médecins (Unaformec). Le thème de la soirée, le suivi des vaccins et la prévention des maladies infectieuses, fait l'objet d'une longue présentation sur rétroprojecteur. L'animateur propose ensuite aux médecins de répondre à une vingtaine de questions sur le même sujet. « La FMC évolue au plan national et certaines méthodes pédagogiques seront préférées et auront un barême plus intéressant que d'autres. Les groupes de réflexion comme les nôtres devraient être bien notés », confie le Dr Michel Médioni, président de l'association locale depuis sept ans. Le médecin généraliste de St-Maur a déjà commencé à programmer les séances de l'année à venir. Pour coller à l'actualité médicale, un groupe de pairs sur le dossier médical partagé sera organisé à la rentrée.
Dans les rangs des médecins redevenus étudiants le temps d'une soirée, Catherine, assidue des réunions mensuelles de l'Unaformec à Créteil depuis seize ans, prend note. Installée en Seine-et-Marne, elle n'hésite pas à faire le déplacement « pour se remettre à niveau ». « Les thèmes répondent presque toujours aux questions que les généralistes se posent dans leur exercice quotidien », explique-t-elle.
Ce qui se passe au sein des plus hautes instances de la FMC ne l'intéresse guère. Bien sûr, elle se réjouit de la reconnaissance de la formation continue des médecins. Evidemment, elle est favorable aux mesures incitatives que pourrait adopter le Conseil national. Mais le plus important, à ses yeux, c'est que la formation reste « facile d'accès et ne soit pas soumise à des contraintes administratives ».
Sa voisine, Camille, fait des remplacements en banlieue parisienne depuis huit ans. En plus de la lecture de dossiers dans des revues scientifiques, elle se déplace aux réunions organisées par plusieurs associations: « Si c'est pour trouver exactement ce qui est écrit dans les bouquins, ça ne m'intéresse pas », prévient-elle. Camille ne remet pas en cause l'obligation de la FMC. « Il me semble nécessaire de s'investir. Les connaissance médicales évoluent vite et si les médecins ne se mettent pas au goût du jour tous les cinq ans ils peuvent devenir dangereux. » Et comme beaucoup de ses confrères, elle ne sait rien des institutions qui vont définir les thèmes prioritaires de formation. « Le Conseil national de formation médicale continue ? Je ne suis pas au courant. »
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