La prévalence en forte hausse du diabète dans les populations asiatiques s’explique-t-elle par la consommation d’une alimentation occidentale ? Des chercheurs de Harvard tendent à prouver que oui dans une petite étude randomisée chez 24 Américains d’origine asiatique (Chinois, Japonais, Coréens) et 16 autres d’origine caucasienne.
L’occidentalisation de l’alimentation traditionnelle, qui est naturellement riche en fibre et pauvre en graisse animale, semble plus délétère sur le plan métabolique pour les sujets Asiatiques, plus enclins à développer une insulinorésiststance et à terme un diabète. Les Américains d’origine asiatique ont un risque de diabète 20 % plus élevé que ceux d’origine caucasienne.
Rien n’aurait été interprétable, sans un protocole qui a fait ressembler l’essai à une émission télévisée culinaire. Les chercheurs ont apporté un grand soin à organiser les repas. Des chefs cuisiniers étaient commis à préparer des mets savoureux et aussi appétissants, qui étaient livrés tous les 2 à 3 jours pour garantir leur fraîcheur. Leur teneur énergétique se devait d’être identique. Un complément vitaminique était ajouté pour tous les participants pour minimiser les biais potentiels liés à l’apport de micronutriments.
Beaucoup de fibres et moins de lipides
L’étude a consisté à délivrer une alimentation de type traditionnel pendant 8 semaines à tous les volontaires, comprenant 3 repas principaux et une collation. Les sujets étaient ensuite randomisés pendant les 8 semaines suivantes entre un régime de type occidental (RO) ou le même régime asiatique traditionnel (RAT). Si la composition en protéines était la même entre les deux (15 % pour le RAT, 16 % pour le RO), les régimes variaient par leur composition en glucides (50 % pour le RO et 70 % pour le RAT), en lipides (34 % pour le RO et 15 % pour le RAT) et en fibres (6 g pour le RO et 15 g pour le RAT).
Tous âgés entre 25 et 55 ans, les participants étaient considérés à risque de diabète, soit en raison d’un antécédent familial (au 1er ou 2e degré), et/ou un antécédent de diabète gestationnel et/ou une glycémie à jeun ou une mauvaise tolérance au glucose. Leur corpulence était de normale à en surpoids avec un indice de masse corporelle (IMC) compris entre 18,5 et27 kg/m2.
Quelle que soit l’origine ethnique, l’instauration du régime traditionnel a entraîné une amélioration du profil insulinique avec une insulinémie plus faible et moins de tissu adipeux (-1,7 %) et en particulier moins abdominal (-2,2 %). En revanche, lors du passage du RAT vers le RO, des différences sont ressorties selon l’origine ethnique. Si les sujets asiatiques prenaient moins de poids, leur profil d’insulinosensibilité était plus mauvais avec une plus grande augmentation en sécrétion d’insuline.
Malgré les efforts pour garantir des apports isoénergétiques entre les deux types d’alimentation, le RAT a entraîné une perte de poids par rapport au RO (-1,6kg) et a amélioré l’insulinosensibilité dans les deux groupes, quand le RO aggravait le profil métabolique. Et comme l’a fait remarquer le Pr George King, du Joslin Diabetes Institute à Harvard, l’auteur principal : « Il était presque impossible d’empêcher la perte de poids avec la nourriture asiatique, et ce n’était pas parce que la nourriture n’était pas bonne ! Et presque tout le monde a pris du poids avec le RO, nous avons dû vraiment surveiller de près pour qu’ils n’en prennent pas trop ». Pour le Dr Ka Hei Karen Lau, l’une de ses collègues, co-signataire: « C’est une bonne nouvelle pour les Américains asiatiques ; Nous sommes à risque de diabète, mais nous pouvons avoir recours au régime pour le prévenir ».
Plos One, publié en ligne le 17 septembre 2014
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature