Décision Santé. Quelle incidence, sur le médico-social, attendez-vous de la mise en place des ARS ?
Nora Berra. Ce qui est important, dans les ARS, c’est le décloisonnement du sanitaire et du médico-social.
Nous allons pouvoir développer une politique de gérontologie au sein des territoires, grâce à la participation des usagers, et de toutes les instances des ARS. Cela passera aussi par une identification des réels besoins dans les territoires. Nous pourrons dès lors lancer des appels à projet, afin de sélectionner les promoteurs qui répondent le mieux aux besoins des usagers.
D. S. Comment vont se dérouler ces appels à projet ?
N. B. Une commission spécifique médico-sociale va être mise sur pied dans chaque région, qui comprendra aussi bien les services de l’ARS que des conseillers généraux, mais également les représentants des usagers. Cette commission aura pour tâche d’édifier un schéma régional d’organisation médico-sociale. C’est sur cette base que seront lancés les appels à projets. Grace à cette procédure, il sera possible d’autoriser et de financer plus vite les établissements.
D. S. Comment, dans ce cas, entrevoir la coopération du sanitaire et du médico-social ?
N. B. Nous devons avoir une vue globale. Les ARS permettent de mettre de la cohérence dans la prise en charge des patients, et d’assurer un véritable parcours gérontologique, du médico-social vers le sanitaire. Ces passerelles seront matérialisées, puisque certains lits du sanitaire seront, en fonction des besoins, transformés en lits médico-sociaux.
D. S. Il existait déjà des filières gériatriques. Qu’est-ce que les ARS vont apporter de plus?
N. B. Cette coopération existait, mais n’était pas optimale. Les territoires ne sont pas égaux aujourd’hui. Avec les ARS, nous aurons un schéma régional reproductible dans toutes les régions, plus équitable.
D. S. La mise en place des ARS va-t-elle simplifier les flux de financement du médico-social ?
N. B. La sélection de projets répondant à des besoins va nous simplifier la tâche. Aujourd’hui, nous disposons de comité régional de l’organisation sociale et médico-sociale (Crosm) mais aussi d’avis émis de la Ddass, de la préfecture… Le schéma sera dorénavant plus simple : nous aurons un directeur d’ARS qui élaborera un schéma régional médico-social, soumis à concertation avec le département. La définition de ce schéma déterminera une enveloppe nécessaire à son développement. Parmi les enveloppes gérées directement par le directeur d’ARS, le médico-social constitue la fraction la plus importante (plus de 16 milliards d’euros) en 2010 et la plus dynamique (+ 5,8 % en 2010 contre + 3 % pour l’Ondam général). La loi ne permettra pas d’utiliser ces moyens à d’autres fins.
D. S. Qu’en est-il de la fongibilité asymétrique des ressources ?
N. B. Vous avez constaté que des services ferment, parce qu’il n’y a pas suffisamment de fréquentation, en particulier dans certains services de chirurgie… La logique voudra que ces lits soient affectés au médico-social, en fonction des besoins. L’inverse ne peut être réalisable : aucun lit du médico-social ne sera transformé en lit sanitaire, car l’évolution démographique entraîne une montée générale des besoins.
D. S. Peut-on imaginer qu’un hôpital local en milieu rural puisse être transformé en Ehpad ?
N. B. Oui, pourquoi pas ? Mais il ne s’agit pas d’une question de statut. Ce qui compte, c’est de mieux répondre aux besoins des personnes âgées. Et les hôpitaux locaux y contribuent aussi.
D. S. La mise en place des ARS va de pair avec celle du Comité national de pilotage des ARS. Comment votre secrétariat aux Aînés va-t-il se positionner entre le comité de pilotage et le ministère de la Santé ?
N. B. Ce sera l’occasion de consolider les passerelles déjà existantes. Nous travaillons avec le ministère de la Santé, mais aussi avec d’autres ministères. Nous pourrons mieux faire valoir nos problématiques. Cela nous permet d’être plus réactifs. Je serais vigilante avec mes collègues du gouvernement à ce que les ARS identifient clairement le médico-social dans leur organigramme et dans leurs objectifs stratégiques.
D. S. Les ARS vont-elles relancer les établissements médico-sociaux du secteur public ?
N. B. Le médico-social, grâce aux ARS, va forcément se développer. Ne fût-ce que grâce à la fongibilité asymétrique des ressources. Pour ce qui est de la création d’établissements, nous emploierons la méthode de l’appel à projet. Le projet le plus approprié sera sélectionné, qu’il provienne d’établissements publics ou privés. Nous avons évidement besoin d’un secteur public fort. Pour moi, ce qui compte, c’est la réponse aux besoins des personnes âgées, et la possibilité pour les personnes âgées d’accéder financièrement aux Ehpad. De ce point de vue, le secteur public, dont les places sont intégralement agréées à l’aide sociale, joue, avec le secteur associatif, un rôle primordial en termes d’équité sociale.
D. S. Quelles seront les prérogatives des ARS sur les conseils généraux qui financent largement le médico-social ?
N. B. Les ARS englobent les Ddass, Drass, ARH, etc. Mais la réforme des ARS respecte totalement les compétences des conseils généraux, qui restent compétents pour l’hébergement et la dépendance, l’organisation et la tarification des services d’aides à domicile. il faut souligner que les conseils généraux auront toutes leurs places dans la définition de la programmation médico-sociale, puisqu’ils participeront à la commission de coordination, qui réunira l’ensemble des partenaires institutionnels.
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