LES MÉDECINS généralistes vont-ils, oui ou non, se mobiliser en masse dans le cadre d'un mouvement national de contestation ? La question reste ouverte alors que se jouera ce soir – plus vraisemblablement cette nuit – l'épilogue des négociations tarifaires. Même imparfait, un accord sur la revalorisation du C ne va-t-il pas tuer dans l'oeuf toute volonté de révolte des médecins de famille ?
Bien au contraire, les anti-convention toujours réunis en intersyndicale (MG-France, FMF, Espace Généraliste, Uccmsf) veulent croire que «la mayonnaise est en train de prendre partout» sur le terrain, selon l'expression du président de la Fédération des médecins de France (FMF), Jean Claude Régi, qui n'est pourtant pas le plus va-t-en-guerre. Un sondage BVA pour notre confrère « le Généraliste »révèle-t-il que, pour l'heure, les médecins ne sont guère disposés à se lancer dans une guérilla tarifaire puisque près de 60 % s'y refusent (« le Quotidien » du 5 mars) ? Qu'importe : MG-France affirme lui aussi que l' «exaspération ne cesse de monter» et, avec elle, la mobilisation en médecine générale qui irait «crescendo» selon des modalités diverses (grève de la télétransmission, cotations CS sur les feuilles de soins, refus de recevoir les délégués des caisses...). «C'est un mécontentement polymorphe mais, tous les jours, des médecins généralistes font connaître leur ras-le-bol, résume le Dr Thierry Lebrun, premier vice-président de MG-France. Même si ça part dans tous les sens, même si la peur de la transgression sur les tarifs est bien normale, un mouvement de fond est lancé.» Mouvement que viendrait alimenter le «harcèlement croissant» de l'assurance-maladie «sur les ALD, les IJ, la télétransmission».
Quant à la «comédie» des négociations, le Dr Lebrun en dénonce par avance le dernier acte. «C'est déjà un échec: signer le C à 22euros pour le gouvernement d'après, on se fiche du monde.»
Pour Espace Généraliste, le C à 22 euros est une «insulte» aux médecins concernés. «Trop, c'est trop. A nous de mettre le feu si on en reste ce soir à ce mépris»,écrit le syndicat dans un courriel aux médecins.
Berceau des coordinations.
A ce jour pourtant, les opposants se sont contentés de lancer une consigne nationale «facile à suivre»,selon l'aveu d'un des responsables : les médecins sont appelés à demander immédiatement aux conseils départementaux de l'Ordre leur qualification en tant que «spécialistes en médecine générale», condition pour accéder à la nomenclature et aux majorations spécialisées. Dans la Drôme, département d'où est parti le mouvement des cotations CS, symbole de la revendication d'équité tarifaire, «plus de la moitié» des omnipraticiens, selon MG-France, formaliseront demain cette demande de qualification de spécialiste lors d'une «remise officielle» au conseil de l'Ordre. «C'est important, cela va accentuer le mouvement»,explique le Dr Geneviève Royannez (MG-26).
En fait, plutôt qu'un mot d'ordre national prématuré qui risquerait d'être peu suivi, les syndicats hostiles à la convention continuent de miser sur les initiatives de la « base » censées surgir au cours d'assemblées générales locales unitaires. Faut-il y voir un pas vers l'extension du conflit en médecine générale ? En Normandie, berceau historique du mouvement des généralistes coordonnés, une journée de fermeture totale des cabinets a été programmée le 29 mars à l'appel des syndicats FMF et MG-France des départements du Calvados, de l'Eure, de la Manche, de l'Orne et de la Seine-Maritime. Dans cette région, souvent à l'avant-garde des frondes médicales, les médecins sont invités à se rassembler «au pont de Normandie, symbole de modernité et d'avenir» pour alerter les pouvoirs publics sur la menace de disparition de la médecine de proximité sur fond de «désertification inéluctable».
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