L’endocardite infectieuse (EI) est relativement rare, moins de deux mille cas par an en France, mais sa mortalité lourde, autour de 20 %. La logique demandait donc dans certaines valvulopathies une antibioprophylaxie pour supprimer les bactériémies secondaires à des interventions ; si ce n'est qu'aucun essai randomisé n'a fait la preuve chez l'homme de l'efficacité ou non de l'anti-biothérapie pour réduire la bactériémie et que, même efficace à 100 %, elle ne préviendrait qu'un petit nombre d'EI, la proportion d'EI liée à des gestes invasifs étant de plus en plus faible, tandis que celle sans cardiopathie connue devient de plus en plus importante. Il apparaît aussi que les activités quotidiennes (brossage des dents, mastication) provoquent des bactériémies cumulées dépassant celles occasionnées par la chirurgie dentaire, par exemple. Si on tient compte du risque d'apparition de résistance, d'allergies aux antibiotiques, des exceptionnels chocs anaphylactiques et, sans doute, de motivations économiques, le rapport bénéfice/ risque ne semblait plus porter vers l'antibioprophylaxie systématique.
Placés devant le choix, « prophylaxie pour tous », « plus d'antibiotiques du tout » ou « attitude raisonnée », les Britanniques ont, en 2008, supprimé toute anti-bioprophylaxie, tandis que les recommandations françaises de 2002 la préconisaient dans les cardiopathies à haut risque (groupe A), laissant aux praticiens leur libre
arbitre lorsque le risque est modéré (groupe B) (lire encadré), les guidelines américaines de 2008 adoptant une position intermédiaire, en supprimant la prophylaxie dans le groupe B, ainsi qu'en cas d'intervention digestive ou génito-urinaire et ne la maintenant que pour la chirurgie dentaire impliquant les muqueuses buccales ou la région périapicale.
Prophylaxie ou pas ?
La décision repose sur trois questions : la cardiopathie sous-jacente, le terrain et l'intervention sont-ils à risque ? Dans les cardiopathies du groupe B, la prophylaxie sera plus volontiers indiquée sur un terrain fragile – sujet âgé, diabétique, immunodéprimé ou en cas de pathologies sévères associés – et, globalement, pour toutes les interventions longues, difficiles et hémorragiques.
Le détail peut être consulté sur le site de la Société d'infectiologie ou des différentes sociétés savantes. Le souhait du patient doit être pris en compte, car il ne sera pas toujours évident d'expliquer à un cardiaque qui a toujours fait ses détartrages sous antibiothérapie qu'il n'en a plus besoin !
La prophylaxie repose en France sur la prise unique per os avant l'intervention de 3 g d'amoxicilline (2 g pour les moins de 60 kg), qu'on remplacera, en cas d'allergie, par la pristinamycine (1 g) ou la clindamycine (600 mg). Il est au moins aussi important de veiller au quotidien à une hygiène cutanée et bucco-dentaire soigneuse et à amener le patient à consulter immédiatement en cas
de fièvre dans les trois mois suivant le geste. Le sujet de l'antibioprophylaxie de l'EI n'est pas pour autant clos, l'impact clinique et microbiologique de ces recommandations faisant l'objet d'un suivi attentif.
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