Classique / « Roméo et Juliette », à Biarritz puis en tournée

Les amants in loco

Publié le 06/09/2010
Article réservé aux abonnés
1286889210175835_IMG_41965_HR.jpg

1286889210175835_IMG_41965_HR.jpg
Crédit photo : O. HOUEIX

POUR ILLUSTRER l’histoire des amants de Vérone, les chorégraphes choisissent plus volontiers la partition de Prokofiev que celle de Berlioz. Composée en 1839 par le jeune Berlioz, amoureux éperdu du théâtre shakespearien, « Roméo et Juliette » est l’œuvre d’un visionnaire qui regarde avec une forme neuve vers un avenir qui s’appellera « Les Troyens ». Béjart, en 1966, en a laissé une grande chorégraphie et, plus récemment, le Ballet de l’Opéra de Paris a fait entrer à son répertoire celle qu’a réalisée, en suivant scrupuleusement la partition de Berlioz, la Berlinoise Sasha Waltz.

Thierry Malandain a préféré son propre montage de la partition, ne gardant qu’une heure dix de musique, en commençant par le récit final du frère Laurent et en conservant l’essentiel des pages symphoniques de cette œuvre patchwork et splendide qui ne fut pas composée pour être dansée. L’enregistrement retenu est celui de John Elliot Gardiner, dans lequel Gilles Cachemaille chante le rôle du frère Laurent. Le minimalisme du décor – de superbes malles de voyage en acier poli et une toile de fond blanche – et l’étrangeté des costumes – robes de mariées de récupération et costumes noirs portés sans chemise pour les hommes et beaucoup de scènes dansées dans la quasi-nudité –, tranchent avec le romantisme du propos et de la musique et permettent à la fois beaucoup d’effets théâtraux et de se concentrer sur l’essentiel : le drame de l’amour contrarié.

L’émotion.

Malandain a privilégié l’émotion qui se dégage de cette histoire, l’action proprement dramatique résumée dans la musique de Berlioz par le scherzo central n’étant pas négligée, avec une superbe danse de la reine Mab, fée des songes, un solo d’une virtuosité épatante dansé à merveille par l’interprète de Mercutio, Arnaud Mahouy, avant un combat avec Tybalt (Daniel Vizcayo) promptement mené. Si Silvia Magalhaes et Giuseppe Chiavaro sont admirables dans la scène d’amour qui suit la fête, ils se démultiplient en nombreux Roméo et Juliette dans les scènes du jardin et du tombeau, créant avec un jeu de reflet sur l’acier des malles un effet dramatique formidablement efficace.

Très riche en idées chorégraphiques et utilisant un vocabulaire qui privilégie toujours l’expression et l’émotion, ce spectacle, présenté en avant-première à Vérone dans le cadre du festival Estate Teatrale Veronese, est certainement l’un des meilleurs que l’on ait pu voir de Thierry Malandain, avec une compagnie de vingt danseurs, récemment renouvelée en partie, dans une forme éblouissante. Il ne faudra pas manquer sa première représentation française au festival Le Temps d’Aimer, à Biarritz, le 11 septembre, ou son passage dans de nombreuses villes françaises et étrangères au cours de cette nouvelle saison.

Ballet Malandain Biarritz (www.letempsdaimer.com et tél. 05.59.22.20.21). Prochaines représentations : Biarritz (Le temps d’aimer) le 11 septembre, Villefontaine les 11 et 12 octobre, Luxembourg les 15 et 16 octobre, Nevers le 1er décembre, Courbevoie le 11 décembre, Vendôme le 14 décembre, Arcachon le 17 décembre.

OLIVIER BRUNEL

Source : Le Quotidien du Médecin: 8808