Le traitement actuellement recommandé après un infarctus aigu du myocarde (IM) compliqué d'une dysfonction systolique du ventricule gauche (DSVG) repose sur les IEC et les bêtabloquants. La mortalité et la morbidité restent cependant élevées chez ces patients.
En 1999, l'étude RALES (Randomized Aldactone Evaluation Study) a montré une réduction de la morbi-mortalité chez les malades présentant une insuffisance cardiaque sévère due à une DSVG et traités par la spironolactone, inhibiteur non spécifique de l'aldostérone. L'hypothèse testée par les mêmes investigateurs lors de l'étude EPHESUS (Eplerenone Post-Acute Myocardial Infarction Heart Failure Efficacy and Survival Study) présentée par Bertram Pitt (université du Michigan, Ann Arbor) lors de l'ACC 2003 et publiée simultanément, était qu'un inhibiteur plus sélectif de l'aldostérone, tel que l'éplérénone, pouvait réduire la morbi-mortalité dans le post-infarctus compliqué d'une DSVG et d'une insuffisance cardiaque.
Cette étude internationale (37 pays) a inclus 6 642 patients, âgés en moyenne de 64 ans, et présentant une DSVG modérée (fraction d'éjection du ventricule gauche < 40 %) et des râles bronchiques de 3 à 14 jours après un IM. Les traitements affectés par randomisation étaient, soit l'éplérénone (25 mg/j), soit un placebo, en plus d'un traitement conventionnel. Après quatre semaines, la dose d'éplérénone pouvait être ajustée jusqu'à 50 mg/j.
Une vie sauvée pour 50 patients traités
Après un suivi moyen de seize mois, l'analyse des critères principaux d'évaluation a clairement montré la supériorité de l'éplérénone sur le placebo, avec une réduction de 15 % de la mortalité globale et de 13 % des décès cardio-vasculaires ou des hospitalisations en milieu cardiologique. L'incidence des décès cardio-vasculaires a été réduite de 17 %, celle de l'insuffisance cardiaque de 15 % et celle des hospitalisations pour insuffisance cardiaque de 23 %. Toutes ces différences étaient statistiquement significatives.
B. Pitt a précisé que une vie par an était sauvée pour 50 patients traités et que le traitement annuel de 33 patients permettait de prévenir un décès cardio-vasculaire ou une hospitalisation en milieu cardio-vasculaire.
L'efficacité de l'éplérénone a été particulièrement marquée chez les patients recevant simultanément le « traitement recommandé » associant un IEC ou un inhibiteur des récepteurs de l'angiotensine et un bêtabloquant, dont la mortalité globale a été réduite de 27 %.
Comparaison avec l'étude RALES
La réduction de la mortalité rapportée de l'étude RALES chez les patients traités par la spironolactone était plus importante, mais la population étudiée était différente. Comparativement aux patients de l'étude EPHESUS, les patients de l'étude RALES étaient plus sévèrement atteints (la spironolactone n'a jamais été évaluée dans l'insuffisance cardiaque légère à modérée) et utilisaient plus les bêtabloquants.
Dans l'étude EPHESUS, les événements indésirables légèrement (mais significativement) plus nombreux dans le groupe éplérénone que dans le groupe placebo ont été des troubles digestifs et des anomalies métaboliques (augmentation de 1,6 % des hyperkaliémies sévères mais diminution de 4,7 % des hypokaliémies par rapport au placebo). En revanche, l'éplérénone n'a pas provoqué les troubles menstruels, les gynécomasties ou l'impuissance fréquemment induites par la spironolactone.
Éplérénone versus défibrillateurs ?
La réduction de la mortalité cardio-vasculaire a été principalement due à une diminution significative de 21 % de l'incidence des morts subites d'origine cardiaque. Cette constatation a des implications importantes.
Une analyse rétrospective des patients dont la fraction d'éjection était < 30 % (principal critère d'inclusion utilisé lors de l'étude MADIT II, ayant démontré l'efficacité des défibrillateurs implantables) a montré une réduction encore plus importante (33 %) des morts subites dans le groupe éplérénone. Selon B. Pitt, la question du rapport coût/efficacité des défibrillateurs implantables est ouverte...
Suite aux résultats de l'étude EPHESUS, une demande d'extension d'AMM a été déposée auprès de la FDA. L'éplérénone, déjà autorisée dans le traitement de l'hypertension aux Etats-Unis, n'est pas encore commercialisée.
D'après la communication de Bertram Pitt (Ann Arbor, Michigan).
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