L'envers du décor

LA VIE D'ARTISTE, c'est pour certains les paillettes et un public nombreux et ravi, et, pour beaucoup, la galère et les déceptions. Alice, Bertrand et Cora font partie de la deuxième catégorie. Alice double en français des mangas et ne court même pas les castings, car on lui en propose rarement. Bertrand est un professeur sans vocation pédagogique qui peine sur son deuxième roman et cherche des lecteurs pour le premier. Et Cora veut chanter, mais pas n'importe quoi ni n'importe comment et, en attendant, anime un karaoké en essayant de se boucher les oreilles.

Le réalisateur-scénariste, qui signe son premier long métrage, n'a pas cherché à réunir les destins des trois personnages qu'il a imaginés. Et pourtant, le récit, passant de l'un à l'autre, a une réelle unité. Celle du vécu, même si le comique de certaines scènes n'est pas réaliste. L'idée d'explorer la quête de la célébrité, Fitoussi l'avait «en tête depuis pas mal d'années». Et il reconnaît s'y être sans doute projeté, «puisque, à cette époque, je débutais dans le métier et que je n'avais aucune certitude quant à mon devenir artistique».

L'autre habileté du cinéaste est d'avoir évité les bons sentiments et le « tout est bien qui finit bien ». Alice et Bertrand ne sont pas des plus gentils, par exemple, et leur entourage est souvent à la peine. Le ton est plus amer que doux mais on rit souvent.

Marc Fitoussi aurait sans doute gagné à donner plus de rythme à son évocation. C'est le seul reproche que l'on puisse lui faire. Les dialogues sont enlevés et le choix des interprètes est un sans-faute. Sandrine Kiberlain, Denis Podalydés, Emilie Dequenne sont plus que convaincants et entourés de nombreux autres comédiens que l'on est contents de voir passer par là (Valérie Benguigui, Grégoire Leprince-Ringuet, Jean-Pierre Kalfon, Aure Atika, et l'on en passe).