LA CHARGE d' « empoisonnement », retenue contre Henri Cerceau et Marc Mollet, ex-membres de la Pharmacie centrale des hôpitaux de Paris (PCH), dans le dossier pénal de l'hormone de croissance extractive contaminée, va être « probablement » transformée en « homicide involontaire » dans les semaines à venir. Ils rejoindront alors les cinq praticiens collecteurs de France-Hypophyse et un médecin prescripteur, poursuivis de ce chef d'inculpation, ainsi les Prs Jean-Claude Job, Fernand Dray et Jacques Dangoumau, respectivement anciens président de France-Hypophyse, directeur de recherche à l'Institut Pasteur et patron de la Pharmacie et du Médicament au ministère de la Santé. Une douzième personne, Michel Baur, de la PCH, est suspectée de « soustraction de preuves ».
La juge parisienne Marie-Odile Bertella-Geffroy, chargée de l'affaire, avait opté pour l' « empoisonnement », sachant qu'un stock d'hormones non retraitées à l'urée avait été mis en circulation jusqu'en février 1986, alors qu'il existait une obligation d' « activation » depuis juin 1985. Mais, dans un scandale analogue, celui du sang contaminé, la Cour de cassation, qui s'est prononcée pour un non-lieu le 18 juin 2003, a écarté la possibilité de poursuivre quatre responsables pour « empoisonnement » ou complicité, estimant qu'une telle incrimination ne peut être justifiée que si l'auteur des faits a « l'intention de donner la mort », ce qui n'est pas établi. D'où l'intention de la magistrate de se rabattre, « très probablement », sur l' « homicide involontaire ».
Un possible procès à la fin de l'année.
Le dossier est actuellement à la chambre de l'instruction pour une requête en nullité sur le volet financier. En cas d'annulation, il est « fort probable », là encore, que cet aspect soit dissocié de la partie santé publique. Selon une plainte déposée par la famille Birolo, des questions se posent quant à l'existence d'un circuit financier qui aurait permis à un responsable de la purification à l'Institut Pasteur de recevoir des gratifications d'une société belge, Techland, impliquée dans la distribution d'hormones frelatées. La chambre de l'instruction est également saisie, par le conseil du Pr Jean-Claude Job, d'une demande d'expertise de lots d'hormones provenant d'hypophyses bulgares. Au cas où ces derniers seraient incriminables, cela pourrait profiter à l'Institut Pasteur.
C'est dans ce contexte quelque peu incertain que Marie-Odile Bertella-Geffroy entend boucler son dossier en juillet. Et elle n'ignore pas qu'une demande en nullité peut être déposée à tout moment par la défense. Dans l'hypothèse la plus optimiste, il n'est pas exclu que le parquet renvoie l'affaire de l'hormone de croissance contaminée devant une juridiction correctionnelle à la fin de l'année.
Les premières plaintes ont été déposées en 1992, il y a aujourd'hui une soixantaine de parties civiles. Comme pour le sang contaminé, l'instruction a révélé que des stocks suspects d'hormones de croissance extractives ont été écoulés, malgré des mises en garde sur une plausible contamination mortifère, en l'occurrence la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ). Des hypophyses étaient prélevées sur des cadavres en France ou à l'étranger, en l'absence de traçabilité, sous l'autorité de France-Hypophyse, puis traitées par l'Institut Pasteur. Dix-neuf ans plus tard, 93 des 900 enfants traités avec des lots d'hormones douteux sont morts et 9 sont atteints de la MCJ.
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