« Un des objectifs du colloque est de réunir différents spécialistes, vétérinaires, médecins, agronomes, spécialistes de l'écologie, techniciens d'élevage, autour de cette pathologie qui reste encore méconnue », confie Guy Joncourt, vétérinaire (Callac, Bretagne) et coordinateur du colloque organisé les 11 et 12 septembre au zoopole de Saint-Brieuc, à Ploufragan, en Bretagne. Ce vétérinaire passionné, qui a diagnostiqué le deuxième cas d'ehrlichiose bovine en 1998 en France, après celui repéré en 1991 dans les Côtes-d'Armor, espère que ce type de manifestation stimulera « de nouvelles recherches à l'échelon national, afin que la maladie soit mieux diagnostiquée, traitée et prévenue ».
Depuis sa description par Hudson et coll. chez les ovins en Ecosse (1932), plusieurs cas ont été rapportés chez l'homme, dont le premier identifié en 1994. Depuis, près de 400 cas cliniques humains ont été recensés aux Etats-Unis. Les premiers cas européens sont apparus en Slovénie du Nord puis en Hollande (« New England Journal of Medicine » du 15 avril 1999).
Cette zoonose émergente, une rickettsiose à Anaplasma phagocytphilum, est transmise par la tique, Ixodes ricinus. Si aucun cas clinique n'a encore été identifié en France - une étude épidémiologique est en cours -, « une meilleure pression diagnostique devrait permettre d'identifier les cas », estime Guy Joncour. Car, sur le plan clinique, les symptômes de l'ehrlichiose granulocytique sont peu spécifiques chez l'homme : fièvre, syndrome pseudogrippal avec arthralgies, céphalées, sueurs ; l'éruption cutanée est relativement rare. Sur le plan biologique, il existe une thrombopénie, une leucopénie et une anémie dans la moitié des cas. Des coïnfections peuvent exister avec la borréliose de Lyme et l'encéphalite à tiques. « C'est une maladie des biotopes qui n'existent qu'en foyer, là où les conditions sont favorables aux tiques qui ne sont que les vecteurs de la maladie ».
Coordinateur d'une étude des unions régionales des groupements techniques vétérinaires de Bretagne et des Pays de la Loire, Guy Joncour assure que « l'information et la sensibilisation de ses confrères du Grand Ouest a abouti à de nombreux diagnostics de terrain et de laboratoire. Aux moins 80 foyers bovins ont déjà pu être identifiés de 1998 à février 2003 ». Et, affirme-t-il, la Bretagne et les Pays de la Loire ne sont pas les seules touchées, puisque 25 départements d'autres régions ont signalé des cas d'ehrlichiose bovine.
Des espèces sentinelles
En effet, si les bovins et l'homme sont des hôtes définitifs pour la bactérie, le chevreuil et le renard en sont les grands réservoirs, tout comme les mulots constituent les petits réservoirs. Parmi ces espèces, la faune sauvage constitue une sentinelle pour l'animal domestique et ce dernier est une espèce sentinelle pour l'homme. « Le chevreuil est une sentinelle pour la vache, tandis que la vache est une sentinelle pour l'homme », résume Guy Joncour . Dans cette maladie où la barrière d'espèce n'existe pas, des cas chez les bovins laissent supposer des cas de séropositivité chez l'homme. D'un point de vue pratique, il faut savoir évoquer cette pathologie en cas de fièvre après une morsure de tique, particulièrement en zone endémique. Le traitement recommandé est la doxycycline.
* Né en 1989, le zoopole est un site créé pour rapprocher différentes structures professionnelles impliquées dans le domaine des sciences du vivant, plus particulièrement en santé animale et en hygiène alimentaire.
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