L A direction de Danone a beau dire qu'elle n'a rien fait contre les employés de LU que ce que d'autres sociétés ont fait dans le cadre des restructurations, elle est condamnée par l'opinion et ne peut sortir indemne du « plan social » qu'elle a adopté.
D'autant qu'à Danone et Marks § Spencer s'ajoutent d'autres drames sociaux : Air Liberté, AOM, Dim, on en passe. En quelques jours, le licenciement de salariés est passé du social au politique : des manifestations sont organisées dont le PC et l'extrême-gauche ravivent les flammes dans l'espoir de gagner la confiance populaire (que les communistes ont partiellement perdue aux municipales).
La récupération est flagrante, mais sensée : elle met les socialistes dans l'embarras, dès lors que Lionel Jospin a des responsabilités que n'a pas Robert Hue et qu'il ne peut pas compromettre la croissance par des mesures démagogiques.
Ceux qui auraient pu empêcher l'exaspération des Français, ce sont les directions d'entreprise qui croient encore gouverner leur affaire comme au siècle dernier. Franck Riboud, le P-DG de Danone, avait tout le temps de préparer sa communication avant d'annoncer des mesures brutales. Et s'il ne l'a pas fait, c'est évidemment parce que, désormais, l'actionnaire prime sur le salarié et que l'effet d'annonce est aussi important pour le cours de l'action qu'il est dévastateur pour celui dont l'existence même est liée à l'emploi. Il en va de même pour les deux compagnies de transport aérien menacées de faillite. Ernest-Antoine Seillière, par ailleurs président du patronat, qui dirige la holding détenant le plus grand nombre de parts dans AOM et Air Liberté, a tenu successivement deux langages : il a d'abord dit qu'il n'était pas concerné par la crise des deux entreprises, puis il a affirmé qu'il travaillait d'arrache-pied à les renflouer.
Du coup, le gouvernement s'apprête à durcir, par voie parlementaire, la législation sur le licenciement. Est-ce la meilleure solution ? Il est prévu de doubler le prix social d'un licenciement dans toute entreprise qui fait des profits. Cela va contraindre toutes les sociétés désireuses de licencier à prouver qu'elles n'ont font pas. De même que le boycottage est absurde dans la mesure où il tend à créer des difficultés commerciales à Danone (et donc à licencier davantage), de même obliger, à la faveur d'une procédure plus compliquée, les entreprises à garder des employés qu'elles ne peuvent plus payer n'est pas sain.
Mais les patrons ne peuvent s'en prendre qu'à eux-mêmes. Ils auraient dû comprendre que les Français ne les suivent plus quand ils font du licenciement l'outil premier de la gestion. Ce devrait être au contraire la solution ultime. A l'inverse, la grève, autrefois action de dernier recours, est devenue depuis quelques années la première riposte des travailleurs mécontents. Nous sommes entrés dans une période sociale des extrêmes.
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