DELPHINE BERTHOLON a publié deux romans, dont « Twist », déjà remarqué. « L’Effet Larsen » (1) est un enchantement dans la simplicité, qu’il s’agisse de l’écriture, fluide, ou de l’intrigue à rebonds où le quotidien d’une adolescente oscille entre drame et humour.
Nola a 18 ans lorsque Paris prolonge l’euphorie d’avoir gagné la Coupe du monde de football. Elle avait dû quitter le charmant pavillon de Montreuil de son enfance pour emménager, après la mort subite du père abattu en pleine rue par un déséquilibré – dans un affreux appartement aux confins du périphérique. Le bac en poche, la jeune fille travaille dans un bar du quartier où se réunit un ramassis de pauvres hères plus ou moins alcooliques, et prend soin de sa mère, Mira, qui refuse de plus en plus les bruits de la vie et sombre dans une fatale dépression. Veut-elle ainsi se punir de la mort de son mari ?
La narratrice a 30 ans lorsqu’elle se souvient de cet été caniculaire. Elle a fait son chemin, elle a dépassé son chagrin. Mais à quel prix ? Delphine Bertholon dénoue le nœud de ce drame complexe avec des retours en arrière. Aux difficultés habituelles de l’adolescence, à la disparition d’un être cher, à la maladie d’une mère, s’ajoute en effet le non-dit, que la jeune Nola va devoir forcer pour pouvoir grandir et « s’en sortir ».
Alors que Mira se retranche du monde, et pour découvrir ce secret qui la ronge, elle se met au contraire à l’écoute de l’autre, des autres, ses voisins qu’elle évitait, moquait ou méprisait dans l’insouciance de sa jeunesse, et découvre auprès d’eux autant de manières d’apprivoiser la douleur. Maladroite parfois mais déterminée, elle prend en mains son destin. L’émotion à fleur de mots.
Un hymne à la musique.
L’écoute est aussi au cœur de « Fugue » (2), celle de la musique et surtout de soi-même. Ce roman-parabole est le deuxième d’Anne Delaflotte-Mehdevi, qui s’inspire de son expérience personnelle. De son métier de relieur qu’elle exerce à Prague, elle a tiré « la Relieuse du gué », et, passionnée de piano et de chant lyrique, elle imagine ici une figure de femme d’une belle tonalité.
Pour Clothilde c’est la première rentrée où ses quatre enfants, les jumeaux après Antoine et Madeleine, sont en classe. Un peu désemparée, elle reçoit soudain un appel de la directrice pour l’avertir que Madeleine s’est enfuie. Clothilde part à sa recherche et hurle son nom tout au long de la rivière. L’enfant est saine et sauve mais sa mère a perdu sa voix. Refusant tout traitement et malgré l’incompréhension des siens, elle trouvera paradoxalement le salut dans le chant.
Le personnage qui évolue sous les traits de Clothilde s’appuie sur son handicap « involontaire » pour se transformer en une femme enfin accomplie, parce qu’elle assume son amour de la musique et de l’art lyrique, qu’elle mettait jusque-là au second plan. Sans abandonner ses rôles d’épouse et de mère, d’amie et de fille aussi, sans pouvoir s’exprimer autrement que par écrit alors que sa voix chantée monte en puissance et en beauté, elle ira jusqu’au bout de sa passion. Quelles qu’en soient les conséquences. Avec la force tranquille d’une vraie vocation.
(1) JC Lattès, 363 p., 18 euros.
(2) Éditions Gaïa, 327 p., 21 euros.
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