La santé en librairie
Premier constat du savant : l'homme d'aujourd'hui a de bonnes raisons d'être angoissé, tant son univers a changé, matériellement, certes, mais aussi et surtout conceptuellement, et ce de façon irréversible. Il sait désormais que « la réalité n'est plus déterminée, mais aléatoire, que la logique n'est plus rigoureuse, mais remplacée par l'indécision ». Il est obligé de constater son isolement sur une planète Terre vouée à la finitude, menacée dans ses « biens les plus précieux », de la couche d'ozone au pétrole.
De plus en plus puissant cependant dans un monde mieux connu, l'homme prend conscience en même temps des risques de destruction qui accompagnent ses nouveaux pouvoirs. Et il se prend à imaginer, à la suite des économistes désormais au pouvoir, que la solution à tous ses maux résiderait dans « l'augmentation de la consommation ». Le risque est alors de voir reléguer au dernier rang des préoccupations « les biens dont la valeur ne peut être définie », telles la santé, l'éducation, la justice, la culture.
Albert Jacquard, « activiste humain, comme il aime à se définir lui-même », mène rondement son chemin de l'angoisse vers l'espoir, décidé à convaincre ses congénères humains de participer à la construction lucide du monde de demain. Dans ce dessein, il anime pour eux un univers dont l'élan vers la complexité a été remarquablement accéléré par l'apparition de l'ADN et dont la tendance à la désorganisation peut être tempérée par les échanges entre les êtres et leur environnement.
Du bon usage du cerveau
L'histoire du vivant, pour être moins longue que celle de l'univers, est elle aussi riche d'enseignements : ainsi le vivant a-t-il inventé avec la procréation l'art de faire du nouveau, avec l'évolution, l'art d'utiliser les « ratés », avec le cerveau humain, un aboutissement de complexité.
Pour que l'humain fasse le meilleur usage de cet incomparable cerveau, doué de conscience et inventeur de l'avenir, Albert Jacquard insiste sur les dangers dont il convient de se garder en priorité : danger des hiérarchisations qui se substituent aux classements, danger de l'excès d'ordre par rapport au désordre, danger inhérent à chaque « progrès » acquis... Alors pourra se construire un monde fait non seulement d'individus, mais de personnes en nombre raisonnablement limité, liées entre elles selon des réseaux de solidarité et non plus divisées par une compétition de plus en plus sauvage. Les pays méditerranéens pourraient d'ailleurs servir de laboratoire pour un système éducatif qui abolirait « les frontières qui s'opposent aux échanges de cultures et d'idées » et favoriserait la création d'une véritable communauté humaine, où chaque homme aurait sa place : « ...une note de musique n'a aucune valeur en elle-même, elle devient nécessaire à la mélodie lorsqu'elle s'insère dans l'harmonie d'un accord ».
« De l'angoisse à l'espoir », d'Albert Jacquard, Calmann Lévy, 137 pages, 11 euros.
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