LE LONG combat mené par les psychiatres et les usagers de la santé mentale a payé. Lors de la discussion en deuxième lecture à l’Assemblée de son projet de loi de prévention de la délinquance – le dernier grand projet qu’il défend en tant que ministre de l’Intérieur –, Nicolas Sarkozy a annoncé le retrait du projet des dispositions relatives aux hospitalisations d’office.
«Nous souhaitons être attentifs (aux) craintes des professionnels et des familles à l’égard d’une réforme qui serait limitée à la seule hospitalisation d’office», a-t-il expliqué lors d’un discours très chahuté par l’opposition de gauche.
Ces craintes, les psychiatres et d’autres professionnels concernés les avaient exprimées dès la préparation du projet. Lors de la première lecture, au Sénat, en septembre, l’Union syndicale de la psychiatrie avait dénoncé un texte qui, selon elle, «se sert des psychiatres dans un contexte de contrôle social». En novembre, les psychiatres et les associations d’usagers de la santé mentale se réjouissaient du retrait, suivant la proposition du député-médecin UMP Jean-Michel Dubernard, du volet santé mentale du projet avant son examen par les députés. Mais l’inquiétude revenait avec l’annonce d’un projet de réforme par ordonnance de la loi de 1990, celle qui régit l’hospitalisation sous contrainte. Et si le gouvernement subissait un nouveau revers, avec l’annulation par le Conseil constitutionnel d’un article en ce sens introduit dans la loi sur certaines professions de santé, restait le projet de loi sur la délinquance avec à nouveau un volet psychiatrie. Il renforçait notamment le rôle des maires dans les procédures d’hospitalisation d’office et prévoyait la création d’un fichier national de patients ayant été hospitalisés d’office en psychiatrie.
Une réforme d’ensemble.
La mobilisation avait donc été à nouveau relancée. Mardi, quatre syndicats* appelaient les 3 500 psychiatres hospitaliers à faire grève pour obtenir le retrait des articles contestés. Une grève très suivie, selon le Syndicat des psychiatres de secteur (SPS), qui a estimé le taux de mobilisation de 75 à 80 %. Le mouvement était soutenu par la Fédération hospitalière de France (FHF) et les deux principaux syndicats de médecins hospitaliers (CPH et Inph), des associations de malades et de familles (Unafam, Fnap-Psy), la CGT, la Cfdt, l’Unsa et Sud.
«C’est une très grande victoire pour la psychiatrie française», s’est félicité le président du SPS, Norbert Skurnik. «Cela fait deux siècles qu’on se bat pour déstigmatiser la maladie mentale, et nous ne pouvions pas accepter ce retour en arrière qui créait un amalgame entre les malades et les délinquants», a-t-il souligné.
Que va-t-il se passer maintenant ? Nicolas Sarkozy s’est engagé à ce que «cette réforme d’ensemble», celle des hospitalisations d’office, «soit proposée au Parlement dès l’ouverture de la prochaine session». Ce sera lors de la prochaine législature. «La victime n’est pas simplement le malade mais aussi celle qui croise le malade. Le malade a des droits, mais la victime du malade a aussi des droits», a lancé à l’Assemblée le ministre de l’Intérieur. Pour les professionnels de la santé mentale, le combat n’est peut-être pas fini.
* Syndicat des psychiatres des hôpitaux, Union syndicale de la psychiatrie, Syndicat des psychiatres d’exercice public, Syndicat des psychiatres de secteur.
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