LA PRISE de poids qui accompagne fréquemment l'arrêt du tabac peut en diminuer le bénéfice. Elle peut même suffire à dissuader certains (plutôt les femmes) de se lancer dans un protocole de sevrage. Ce que montrent Susan Chinn et coll. dans le dernier « Lancet » est l'effet délétère de ces kilos supplémentaires sur l'amélioration des fonctions respiratoires.
Un travail original, en ce sens qu'il a inclus 27 centres européens et que les patients suivis ont bénéficié de mesures du Vems (volume expiratoire maximum-seconde). Cette évaluation objective a permis de constater que chaque kilo superflu s'accompagne d'un moindre gain de Vems... et que les hommes, à ce petit jeu, sont les plus exposés.
Les expérimentateurs européens (dont Bénédicte Leynaert et Françoise Neukirch, Inserm U408, Paris) ont enrôlé 6 654 participants sur 27 centres, entre 1998 et 2002, dans le cadre de l'European Community Respiratory Health Survey II (Ecrhs II). Les sujets, de 20 à 44 ans, devaient répondre à un questionnaire, mais subissaient également des épreuves fonctionnelles respiratoires. Les médecins ont retenu le Vems et la capacité vitale maximale.
Les résultats de ces sevrages tabagiques donnent des résultats divers, selon qu'il s'agit d'hommes ou de femmes et que l'arrêt du tabac est antérieur à l'étude ou survenu au cours de la période de surveillance. Il apparaît donc que le déclin du Vems (exprimé en ml/an) est plus faible chez les hommes qui ont arrêté avant l'entrée dans l'étude (5,4 ml/an) que chez ceux qui ont cessé en cours d'étude (2,5 ml/an), en revanche, il s'aggrave chez les fumeurs (- 4,8 ml/an). Dans les mêmes circonstances, chez les femmes, les chiffres sont respectivement de 1,3 ml/an, 2,8 ml/an et - 5,1 ml/an. Les différences relevées entre les deux sexes sont jugées non significatives.
Plus parlant sont les chiffres lorsqu'ils sont rapportés à la prise de poids. Le Vems s'abaisse, par kilo pris, de 11,5 ml/an chez les hommes et de 3,7 ml/an chez les femmes. Cette donnée autorise les auteurs à conclure que la prise de poids fait diminuer le bénéfice de l'arrêt de l'intoxication tabagique de 38 % chez les hommes et de 17 % chez les femmes. Les hommes qui prennent un kilo par an perdent le bénéfice du sevrage sur leur fonction respiratoire. Pour les femmes, cette perte totale survient à 2,43 kg/an.
Le rapport tour de taille/tour de hanche.
La différence de rôle de la prise pondérale entre les sexes peut s'expliquer, au moins en partie, par la répartition des graisses. Chez les hommes, l'obésité est plutôt abdominale. La relation la plus forte entre la diminution du Vems et la prise de poids se ferait davantage avec le rapport tour de taille/tour de hanche qu'avec l'IMC.
Dans un éditorial, deux médecins de Boston, expliquent la prise de poids par des modifications des goûts alimentaires, une augmentation de la prise calorique, une baisse des dépenses métaboliques et une augmentation d'activité de la lipoprotéine lipase. Pour contrer ces mécanismes, les substituts nicotiniques semblent efficaces, mais ne font-ils pas que reculer la prise pondérale dans le temps ? Le conseil majeur à donner serait donc d'augmenter l'activité physique en famille, au sein de groupes ou encore d'exercices programmés au travail.
« Lancet », vol. 365, 7 mai 2005, pp. 1600-1601 (éditorial) et 1629-1635.
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