En application du protocole de Tokyo, la France s'est engagée à stabiliser, d'ici à 2010, ses émissions de gaz à effet de serre à leur niveau de 1990. Comment le gouvernement peut-il freiner l'envolée des émissions de gaz à effet de serre des transports qui ont bondi de 21 % en onze ans ? Le Premier ministre donne aujourd'hui, à la veille du lancement de la Semaine de la mobilité durable, un début de réponse avec l'annonce d'un programme « Véhicule propre ».
L'objectif du gouvernement est, d'une part, d'augmenter le potentiel de recherche à court et moyen terme pour développer l'émergence de nouvelles filières de véhicules dites alternatives, et, d'autre part, d'accélérer le renouvellement du parc automobile français. La semaine dernière, les présidents des deux groupes automobiles français, Louis Schweitzer (Renault) et Jean-Martin Folz (PSA), ont plaidé auprès de Jean-Pierre Raffarin pour un effort de recherche commun des constructeurs et de l'Etat.
Les filières des véhicules propres disponibles aujourd'hui sur le marché sont représentées par les véhicules fonctionnant au GPL, c'est-à-dire au gaz de pétrole liquéfié (butane et propane), au GNV (gaz naturel pour véhicule) ou à l'électricité. Aujourd'hui, si l'aide de l'Etat a permis de faire passer les filières de véhicules propres du stade expérimental à un véritable stade industriel (en particulier pour les voitures électriques ou les bus GNV), l'avenir de ces filières doit être consolidé.
Les électriques, pour la ville
Pour la filière électrique, les deux freins au développement de ce type de voiture sont le coût élevé d'achat dû à sa production en petite série et son rayon d'action de l'ordre de 80 km par charge. La vocation des voitures électriques n'est pas de remplacer les voitures thermiques « long courrier » mais de constituer des flottes urbaines. Pour les véhicules utilitaires légers, qui représentent les deux tiers des immatriculations, l'usage pertinent concerne des flottes de collecte et de distribution à parcours rationalisé, comme pour La Poste par exemple.
Si le marché des quatre-roues est limité, le marché du deux-roues devrait prendre un essor significatif. Le scooter, par l'absence de ses émissions, en particulier sonores, peut constituer une alternative intéressante à la motorisation thermique.
La filière GNV, quant à elle, a réussi à se développer dans le secteur des bus, avec un parc qui atteint aujourd'hui près de 700 véhicules. Le secteur des véhicules légers reste encore peu important. Même si les constructeurs automobiles estiment que le GNV est un carburant écologique d'avenir, en rupture avec les produits pétroliers, ils restent prudents, compte tenu du fait que tout le réseau de distribution est à construire. Un développement réel de la filière passe par la mise à la disposition du public de ce carburant.
La filière GPL, composée presque exclusivement de véhicules légers utilisés par un large public, a eu une évolution irrégulière du fait de problèmes de sécurité qui n'ont pas été répertoriés correctement depuis l'origine mais qui sont en partie résolus aujourd'hui grâce à la pose de nouvelles soupapes.
Quelles sont les évolutions technologiques à attendre en France ? En ce qui concerne les véhicules thermiques, la marge de progrès des moteurs à combustion interne est importante d'un point de vue énergétique, d'autant qu'ils font l'objet d'une réglementation européenne de plus en plus stricte. Les améliorations seront apportées par la généralisation des systèmes d'injection directe haute pression et mélange pauvre pour le moteur à essence, et des filtres à particules pour le moteur Diesel. Ces évolutions viendront d'une gestion électronique allant de l'injection jusqu'au post-traitement. Les constructeurs européens ont pris des engagements de réduction importante de la consommation à l'échéance 2005, d'où la nécessité de permettre un renouvellement du parc. Il faut savoir, par exemple, qu'une voiture sortie en 1992 émet 5 à 20 fois plus de polluants (oxyde d'azote et particules) qu'une autre datant de 2000.
Gros investissements, faible rentabilité
Pour les filières GPL et GNV, bien que les véhicules aient dépassé le stade du prototype, ils ont un degré de perfectionnement technique qui est loin d'atteindre le niveau d'avancement des filières classiques à essence ou Diesel. La principale frontière de développement de ces filières provient du déséquilibre entre les investissements très lourds à fournir pour produire des technologies avancées et le faible nombre de ventes envisageables à court terme.
La chaîne de traction des véhicules tout électrique est bien maîtrisée. La batterie reste l'élément perfectible du système, les performances énergétiques et le coût étant aussi à améliorer. Les batteries au lithium constituent un enjeu mondial.
Il existe également deux nouvelles filières : les véhicules hybrides et les piles à combustibles. Les véhicules hybrides combinent les avantages des motorisations thermique et électrique en proposant des chaînes de traction hybride gérées par un système électronique qui leur permet de fonctionner avec un rendement optimal, donc avec une consommation et une pollution minimales. Les premières architectures hybrides sont des précurseurs des systèmes de traction du futur. Néanmoins, la maîtrise de l'électronique de commande constitue une étape indispensable. Ces véhicules pourraient voir le jour dans le secteur des transports collectifs soumis à une demande de « système-propre » dans les centres-villes. Si le problème du coût peut être maîtrisé, il est possible que l'on assiste à un développement significatif du véhicule hybride.
Dans quinze ans
Enfin, les piles à combustible constituent un système de traction de « rupture ». Les piles à combustible permettent de convertir sans bruit et sans combustion le gaz naturel, le méthane et l'hydrogène en électricité. Lorsqu'elles sont alimentées directement par de l'hydrogène, ces piles n'émettent que de la chaleur et de la vapeur d'eau. Mais beaucoup de chemin reste à parcourir pour un produit industriel. De gros problèmes sont encore à résoudre : coût de la pile, intégration dans le véhicule, gestion de la dynamique de traction.
En conclusion, on peut dire que les véhicules thermiques ne sont pas encore optimisés et que l'adaptation des technologies utilisées pourraient permettre, pour un coût acceptable, d'améliorer leurs performances environnementales et énergétiques. En revanche, il ne faut pas s'attendre à court terme à des sauts technologiques significatifs dans aucune des filières concernées. A moyen et à long terme, les technologies prometteuses (motorisation hybride notamment, véhicules au GNV) pourraient accéder au marché. Pour les piles à combustible, l'échéance 2015-2020 paraît plus plausible. Aujourd'hui, le seul véhicule propre qui existe reste celui qui ne roule pas.
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