CONFRONTÉ à une situation choquante ou traumatisante, l’humain enregistre le film des événements dans ce que Brown et Kulik ont baptisé en 1977 « la mémoire flash ». La théorie se fondait sur le fait que des individus interrogés, longtemps après avoir appris l’assassinat des présidents Lincoln ou Kennedy, se souvenaient avec précision de ce qu’ils faisaient à l’instant même de l’annonce. Cette théorie est partiellement remise en cause par Tali (New York) et coll. Ces psychologues américains mettent en avant le rôle fondamental du vécu et du ressenti de l’individu au moment de l’événement traumatisant. Ils établissent également le support anatomique de cette mémoire flash, l’amygdale cérébrale. Leur travail a reposé sur un drame collectif, l’attentat terroriste du 11 septembre 2001, et sur les progrès de l’imagerie, sous la forme de l’IRM fonctionnelle.
L’équipe a retenu 24 personnes de 20 à 33 ans (dont 8 femmes) qui étaient à Manhattan au moment de l’attaque des Twin Towers. Une partie d’entre elles étaient downtown, à proximité du World Trade Center ; les autres étaient midtown, à quelques kilomètres de là.
Soixante évocations personnelles.
Au cours des séances d’IRMf, les volontaires ont subi deux types de tests. Ils se fondaient sur des mots clés. A la vue, sur un écran, de l’un de ces mots, ils devaient rapporter 60 évocations personnelles en rapport avec eux. Le mot « été » ou « septembre » devait indiquer si le souvenir était en rapport avec les vacances de l’été 2001 ou avec l’attentat.
La première conclusion est anatomique. Au cours des évocations, l’amygdale n’est stimulée que chez les sujets ayant vécu le drame de près. Elle n’est pas activée chez ceux qui étaient à distance. Ce qui sous-entend que, chez ces derniers, les souvenirs du 11 septembre ne diffèrent pas des autres souvenirs personnels.
La deuxième conclusion est que la mémoire flash est proche des autres modes de mémoire. Le traumatisme ne conduit pas à un processus mnésique unique, déclarent les chercheurs. En revanche, les sensations vécues à cet instant jouent un rôle dans la fabrication d’un souvenir auquel on attribuait auparavant les caractères de la mémoire flash. L’implication de l’individu dans des moments émotionnellement très forts entraîne la création de souvenirs à l’acuité exceptionnelle, auxquels le terme de mémoire flash est souvent appliqué. Ces sensations mettent en jeu le système limbique.
« Proc Natl Acade Sci USA », édition avancée en ligne.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature