C'EST A LA TOUTE FIN du XVIe siècle que l'on vit arriver massivement à Amsterdam des communautés juives venant de la péninsule Ibérique et d'Europe centrale. Fuyant l'Inquisition, elles trouvèrent refuge dans la cité portuaire et s'y intégrèrent complètement dès 1630. On assista alors à un véritable épanouissement du judaïsme dans la ville. Les juifs, fidèles à la religion de leurs ancêtres, se mélangèrent en même temps aux chrétiens réformés, dans un climat de grande tolérance. Amsterdam devint la « Nouvelle Jérusalem ».
La passionnante exposition du Musée d'art et d'histoire du judaïsme, très érudite, regroupe plus de 190 pièces : des peintures, parmi lesquelles celles de Pieter Lastman, d'Arent de Gelder, et surtout cinq toiles exceptionnelles de Rembrandt, des dessins, des estampes, des objets d'art, des manuscrits, des archives… Elle fait la lumière sur cette intégration singulière du peuple juif, depuis son établissement aux Pays-Bas (fin du XVIe), jusqu'à l'inauguration de la grande synagogue d'Amsterdam en 1675, dates qui coïncident avec la vie de Rembrandt (1606-1669).
Les premières salles évoquent le milieu social, intellectuel et artistique juif de la ville hollandaise, et les nombreux liens culturels qui se tissèrent entre les protestants et cette nouvelle communauté. Les moeurs, la culture, le rapport à la religion du peuple d'Israël inspirèrent nombre de peintres amstellodamois qui illustrèrent dans leurs oeuvres le dynamisme des commerçants (voir « la Vue d'Amsterdam près de la Haringpakkerstoren », par Ludolf Backhuyzen), les lieux de culte ou les grandes figures et personnalités juives.
On admirera ensuite les représentations que Rembrandt fit du peuple juif, même si, ainsi que le rappelle l'exposition, certains historiens d'art ou exégètes ont toujours tendance à « judaïser » parfois un peu hâtivement l'oeuvre de Rembrandt. Le « Jeune Juif », « le Buste d'un jeune Juif », l'admirable Christ en buste, par exemple, témoignent du respect et de l'intérêt que Rembrandt portait aux juifs. Le maître hollandais se fit le témoin des échanges et débats qui eurent lieu entre les communautés protestante et juive. Il s'intéressa à l'histoire hébraïque, en prenant parfois des libertés avec les Saintes Ecritures, et en humanisant les figures sacrées. A l'instar de nombreux Flamands, il céda au syndrome de l'« identification hébraïque ». La somptueuse toile de « la Disgrâce d'Aman » clôt l'exposition. Selon le « Livre », la reine Esther se fit, devant Aman, l'avocate ardente de la cause du peuple juif. Symbole de la résistance, elle fut en Hollande, au XVIIe siècle, l'une des figures les plus célèbres.
« Rembrandt et la Nouvelle Jérusalem ». Musée d'art et d'histoire du judaïsme. Hôtel de Saint-Aignan, 71, rue du Temple, Paris-3e. Tél. 01.53.01.86.53. Tlj sauf mardi, de 11 h à 18 h (dimanche de 10 h à 18 h). Entrée : 9,50 euros (TR : 7 euros). Jusqu'au 1er juillet.
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