LE DéCRET du 7 avril 2005 offrait aux préfets la possibilité de moduler les horaires de la permanence des soins dans tout ou partie des secteurs de leur département selon «les besoins de la population et les délais d'intervention des services d'urgence appréciés secteur par secteur».
C'est sur la base de ce texte que la préfète de Saône-et-Loire, Anne Merloz, avait pris en mars 2007 un arrêté déléguant la permanence des soins entre minuit et 8 heures du matin, pour l'ensemble des secteurs du département, aux urgences hospitalières. Une décision qui n'a pas été du goût du député socialiste du département, Arnaud Montebourg qui, avec huit autres élus du département, tous conseillers généraux, a saisi le tribunal administratif de Dijon pour faire annuler cette décision qui portait, selon eux, «une atteinte irrémédiable aux intérêts de la population des territoires ruraux».
La justice vient de lui donner raison, plus pour des raisons de forme que de fond. Le tribunal a en effet estimé que les modalités d'organisation de la permanence des soins en Saône-et-Loire prévues dans l'arrêté préfectoral n'avaient pas été déterminées secteur par secteur, comme le prévoit le code de santé publique, mais «en adoptant une position unique pour l'ensemble des secteurs». C'est ce qui a conduit le tribunal administratif à juger l'arrêté préfectoral «entaché d'erreur de droit».
Contacté par « le Quotidien », le député socialiste s'explique (voir ci-dessous) : «Les médecins des secteurs ruraux sont favorables à cette action, indique-t-il. Ce sont eux qui l'ont souhaité car les urgences hospitalières étant éloignées de ces secteurs ruraux, les patients appellent leur médecin traitant la nuit plutôt que de se rendre aux urgences. Ces médecins préfèrent donc assurer une garde de nuit toutes les trois semaines, plutôt que de risquer de se faire déranger la nuit.»
La colère de la FMF.
Côté syndicats parisiens, l'information fait bondir. Pour le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF-généralistes, «Arnaud Montebourg ne connaît rien à la démographie médicale, mais ne perd pas une occasion de se faire mousser. Il n'a rien à dire sur les retraites et les régimes spéciaux, mais cela ne l'empêche pas d'attaquer quelques malheureux médecins isolés qui travaillent dans des conditions déjà épouvantables». Jean-Paul Hamon rappelle en outre qu'un généraliste travaille en moyenne 58 heures par semaine. «Faut-il rappeler, ajoute-t-il, que, après 17heures consécutives de travail ininterrompu, le taux de vigilance est équivalent à 0,5g d'alcoolémie. Quel sera le taux après les 36heures consécutives que veut imposer Arnaud Montebourg?»
Mais sur le terrain, les réactions sont parfois diamétralement opposées. Pour le Dr Catherine Aubry, généraliste à Cluny et présidente (MG-France) de la section généraliste de l'URML, «dans les zones rurales, nous souhaitions continuer à assurer nos gardes entre minuit et 8heures car l'hôpital est éloigné, et nous voulons pouvoir continuer à assurer un service de proximité, notamment pour les personnes âgées. La préfète a arbitrairement décidé d'arrêter la PDS à minuit dans tous les secteurs pour faire des économies. Cela peut se comprendre dans un certain nombre de secteurs urbains ou périurbains, mais il n'y avait aucune raison d'imposer ce système à l'ensemble des secteurs».
Pour le Dr Jean-Maurice Dailly, président de la CSMF-71, le constat est plus mitigé. «Maintenir la PDS toute la nuit dans tous les secteurs alors qu'il n'y a que quatre ou cinq actes après minuit présentait un coût important, indique-t-il au “Quotidien”. Je comprends bien la position du DrAubry, mais si la préfète décide de maintenir la PDS après minuit dans ces secteurs ruraux, je ne donne pas un an pour qu'une bonne partie des médecins de ces secteurs se désengagent, vu le niveau de volontariat. Ceux qui continueront vont s'épuiser, c'est la raison pour laquelle la préfète avait décidé d'arrêter la PDS à minuit dans tous les secteurs du département.»
Contactée par « le Quotidien », la préfecture n'a pas été en mesure de répondre à nos questions. Mais, selon le Dr Dailly, une réunion du comité départemental de l'aide médicale d'urgence et de la permanence des soins (CODAMUPS) est programmée pour mardi 27 novembre : «La préfète va sûrement reprendre le même arrêté, mais en l'argumentant secteur par secteur, comme le prévoient les textes.»
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