Subtotale
Lorsqu'un adénome pléomorphe est suspecté, faut-il nécessairement procéder à une parotidectomie totale ?
Cette tumeur est finement encapsulée (les déhiscences capsulaires sont fréquentes sous la forme de pseudopodes ou de nodules satellites), de telle sorte qu'il faut éviter toute dissection au contact de la tumeur. Une dissection au contact de la tumeur (énucléation) fait courir un grand risque de récidive (de 20 à 45 %). Par ailleurs, le risque de paralysie faciale est augmenté en cas de réintervention. Les localisations multicentriques d'adénome pléomorphe (deux nodules tumoraux ou plus) sont très rares, mais existent, faisant tout l'intérêt de l'imagerie (échographie et IRM). En revanche, une marge de sécurité excessive de tissu glandulaire sain, comme dans les parotidectomies totales conservatrices du VII, ne paraît pas non plus justifiée. C'est pourquoi il semble préférable de réaliser d'emblée une parotidectomie subtotale (lobes profond et superficiel) conservatrice du
VII. Cette attitude est indiquée pour les tumeurs du lobe profond et celles qui ont un contact étroit avec les premières branches de division du nerf facial. Pour les tumeurs isolées du lobe superficiel, dont les constatations peropératoires permettent d'être sûr qu'il n'y a pas eu d'exposition capsulaire, une parotidectomie superficielle est acceptable. L'intérêt de la parotidectomie superficielle isolée est de diminuer l'incidence de la parésie en évitant une dissection excessive du VII ; mais elle ne doit pas se faire au prix d'une exérèse tumorale incomplète.
Les techniques
Dans la technique classique (Redon), la cicatrice comporte un segment préauriculaire vertical, un segment curviligne sous-lobulaire s'arrêtant au bord antérieur de la mastoïde, puis un segment vertical descendant le long du bord antérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien qui se termine dans un pli du cou. L'incision de lifting passe derrière le tragus, dans le pli du lobule, derrière l'oreille et se termine dans les cheveux. Si l'incision est suffisamment prolongée en arrière dans les cheveux, les tissus peuvent être correctement réclinés de telle sorte que la visibilité sur l'ensemble du nerf facial est excellente : le risque de lésion nerveuse n'est pas augmenté. Une variante consiste à prolonger l'incision rétroauriculaire vers la nuque au ras du cuir chevelu la dissection sera un peu plus facile, mais la cicatrice risque de se voir si la coiffure choisie est le chignon.
Que ce soit dans la voie d'abord de Redon ou de lifting, la technique de parotidectomie reste la même. Elle consiste à repérer en premier le tronc du nerf facial puis toutes les branches. La technique de Smas-lifting, associant un lambeau réalisé à partir des tissus qui recouvrent la glande (système musculo-aponévrotique superficiel), vise à combler la perte de substance disgracieuse réalisée par la parotidectomie.
La parésie faciale
Il s'agit d'une paralysie incomplète de la mimique faciale liée au traumatisme de la dissection (à distinguer d'une section accidentelle du nerf). L'incidence et la récupération de la parésie faciale est fonction de plusieurs facteurs :
- de l'importance de la dévascularisation du nerf et donc de la localisation de la tumeur : plus une tumeur est située loin du tronc, c'est-à-dire proche de la bouche ou de l'œil, plus la parésie est fréquente et longue à récupérer bien que plus localisée ;
- de l'âge du patient : un patient jeune aura moins de risques d'avoir une parésie et à défaut récupérera plus vite ;
- de l'expérience gestuelle du chirurgien : « les heures du vol du pilote d'avion sont les heures de bloc du chirurgien » ;
- du fait qu'il s'agit bien d'une première intervention et non d'une reprise chirurgicale, car une seconde intervention augmente considérablement les difficultés techniques et donc les risques ;
- du caractère anastomotique ou pas du nerf. Les nerfs faciaux anastomotiques sont plus difficiles à disséquer mais sont très peu sujet aux parésies.
Il a récemment été documenté que le lambeau de Smas diminuait significativement le temps de récupération nerveuse, le faisant passer en moyenne de trois mois à six semaines (1). Le mécanisme serait celui de l'apport vasculaire de cette lame porte vaisseaux.
Le syndrome de Frey
Le syndrome de Frey se manifeste par une hypersudation et érythème (rougeur) de la région temporale pendant les repas, due à la réinnervation erronée des glandes sudoripares par le nerf auriculo-temporal. Des fibres parasympathiques destinées à la glande salivaire envahissent les axones des fibres sympathiques destinées à la peau et aux glandes sudoripares de la zone de décollement cutané. Ces fibres sympathiques sudoripares ont la particularité d'être cholinergiques, ce qui constitue une exception dans la physiologie du système sympathiques. Ainsi, les deux types de fibres sont toutes deux cholinergiques et fonctionnent donc avec le même médiateur ; et la régénérescence de fibres à destinée salivaire à l'intérieur des fibres à destinée sudoripare suffit à expliquer le changement de fonction. Le lambeau de Smas diminue l'incidence du syndrome de Frey en s'interposant entre les deux contingents nerveux (2) (incidence passant de 33 à 4 %). Les quelques syndromes de Frey survenant avec cette technique semblent être dus à des lambeaux de Smas trop fins ou perforés lors de la dissection et non réparés.
Il est cependant à noter que la toxine botulique s'est révélée très efficace dans le traitement de ce syndrome, mais « mieux vaut prévenir que guérir » .
(1) L. Cesteleyn, J. Helman, S. King, G. Van de Vyvere. Temporoparietal fascia flaps and superficial musculoaponeurotic system plication in parotid surgery reduces Frey's syndrome. « J Oral Maxillofac Surg », 2002 nov. ; 60 (11) :1284-1297 ; discussion 1297-1298.
(2) P.-C. Bonanno, D. Palaia, M. Rosenberg, P. Casson. Prophylaxis against Frey's syndrome in parotid surgery. « Ann Plast Surg », 2000 May ; 44 (5) : 498-501.
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