Dans les premières grandes études réalisées dans les années 1990 sur l'hypertension, la pression artérielle diastolique était l'unique critère d'inclusion. L'hypertension artérielle systolique isolée (HSI) était considérée comme bénigne, car corrélée à l'âge et à l'augmentation physiologique de l'épaisseur de la paroi artérielle ; cette hausse de la PAS s'accompagnant en général d'une baisse de la PAD. Or ces dernières années, la « bénignité » de l'HSI a été remise en question par différents travaux. L'étude SHEP (Systolic Hypertension in the Elderly Program) a d'abord confirmé le bien-fondé de l'instauration, chez des sujets âgés ayant une HSI, d'un traitement antihypertenseur ; celui-ci réduisant de manière importante la morbidité cardio-vasculaire et la mortalité. Dans un deuxième temps, d'autres études (2) ont montré qu'une pression différentielle ou pression pulsée (PP) augmentée, principale caractéristique de ces patients présentant une HSI, était un facteur prédictif de risque cardio-vasculaire, indépendamment de la PAD, de la PAS et de la pression artérielle moyenne. Enfin, chez les sujets traités pour hypertension systolo-diastolique, on remarque, après un certain nombre d'années, que la PAD est souvent contrôlée (inférieure ou égale à 90 mmHg) alors que la PAS reste élevée (supérieure ou égale à 140 mmHg), entraînant une augmentation du nombre d'HSI (3).
Ces observations ont conduit à poser deux questions importantes : en premier lieu, quelle est la prévalence de l'HSI dans une population traitée ou non ? Deuxièmement, quels sont les rôles respectivement de l'âge et du traitement dans la baisse de PAD chez les sujets hypertendus âgés de plus de 50 ans, traités sur une période prolongée ?
Les objectifs de PHASTE
L'un des objectifs de l'étude PHASTE (1) était justement d'estimer la prévalence de l'ISH et sa relation avec l'âge et le traitement pharmacologique dans un large groupe de sujets hypertendus en France.
Dans ce but, 2 952 médecins généralistes ont inclus, de mars à décembre 1999, 17 716 patients hypertendus de plus de 18 ans, traités ou non traités, mais non contrôlés (PAS > 140 mmHg et/ou PAD > 90 mmHg). La pression artérielle étant mesurée chez chaque patient en position assise après au moins 5 minutes de repos, à l'aide d'un tensiomètre à mercure. Un questionnaire incluant les facteurs de risque associés et le type de traitement en cours a été rempli pour chaque patient.
L'âge moyen était de 62 ± 12 ans (extrêmes 18-103). Sur l'ensemble des patients, 53 % des patients étaient des hommes, 72 % étaient traités pour une HTA à l'inclusion, 19 % étaient fumeurs et 17 % diabétiques. Le cholestérol total moyen était de 2,34 ± 0,4 g/l et les valeurs de la pression artérielle égales à 165 (± 13)/95 (± 9) mmHg chez les sujets non traités et de 162 (+/-13)/92 (+/-9) mmHg chez les sujets traités.
L'ensemble des patients sous antihypertenseurs prenait en moyenne 1,4 médicament : en premier lieu, un inhibiteur de l'enzyme de conversion (26 %), un diurétique (25 %), un bêtabloquant (21 %) ou un inhibiteur calcique (20 %), isolés ou associés.
La prévalence de l'HIS augmente avec l'âge
Les patients ont été classés en cinq groupes en fonction de l'âge (de 18 à 103 ans). Dans chaque tranche d'âge, la PAD, la PAS, la PA moyenne et la PP étaient significativement plus basses chez les sujets traités (p < 0,001) que chez les sujets non traités, à l'exception de la PP chez les patients de plus de 75 ans. Ce dernier résultat traduit l'augmentation significative de la PAS et de la PP avec l'âge, parallèlement à une baisse significative de la PAD, que le patient soit traité ou non.
Au total, l'étude PHASTE montre que la prévalence de l'HSI augmente avec l'âge de 20,4 à 35,2 % chez les hommes et les femmes. En ce qui concerne la PP, son augmentation avec l'âge ne paraît influencée ni par le sexe ni par la présence d'un traitement antihypertenseur, ce qui conduit non seulement à une augmentation de la prévalence de l'HSI, mais aussi à une augmentation non négligeable du risque cardio-vasculaire avec l'âge.
L'augmentation de la PP reflète l'atteinte des gros vaisseaux
Cette conclusion est très proche de celle d'autres publications comme celle de « Circulation » parue en juin 2001 (4), qui mettait en évidence le fait que la PAD était le meilleur indicateur pronostique pour des sujets d'âge moyen alors que la PP constituait un indice prédictif plus fiable chez le sujet âgé. Cela souligne l'importance de la prise en compte, à partir d'un certain âge, d'une part, de la pression pulsée, qui est un reflet de l'état de la paroi artérielle, et, d'autre part, de la PAS pour choisir et/ou adapter les doses d'un traitement antihypertenseur.
L'augmentation de la PP, qui traduit l'atteinte des gros vaisseaux et reflète leur rigidité, est particulièrement fréquente chez les patients qui ont déjà fait un infarctus ou un AVC. Chez ces patients, la prise en compte de la PP est capitale et le traitement doit avant tout cibler l'HSI et la PP.
D'après une réunion organisée par Therval Médical avec la participation des Drs Jacques Blacher (service du Pr Michel Safar, hôpital Broussais, Paris) et Jean-Jacques Mourad (hôpital Saint-Michel, Paris).
(1) J.-J. Mourad, J. Blacher, P. Blin et U. Warzocha.
Conventional Antihypertensive Drug Therapy Does Not Prevent the Increase of Pulse Pressure With Age. « Hypertension », 2001 ; 38 : 958-962.
(2) J. A. Millar et coll. « J Hypertension » 1999 ; 17 : 1065-1072.
(3) H. R. Black. « Hypertension », 1999 ; 34 : 386-387.
(4) R. S. Khattar et coll. « Circulation », 2001 ; 104 : 783-789.
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