SI LA CONSTITUTION européenne soumise au référendum dimanche fait de la santé une « compétence partagée » entre l'Union et les Etats membres (« le Quotidien » du 23 mai), l'Europe est déjà bien ancrée dans le milieu des études médicales. L'harmonisation des diplômes engagée avec la réforme du LMD (licence, mastère, maîtrise) doit s'appliquer au domaine de la santé. La reconnaissance des qualifications professionnelles pour tous les Etats membres de l'Union européenne (UE) est également sur les rails. Une directive parue le 8 mars au « Journal officiel de l'UE » précise les conditions de la reconnaissance des qualifications des médecins, pharmaciens, infirmiers, assistants de service social, praticiens de l'art dentaire, sages-femmes, architectes et géomètres-experts. « Les diplômes, certificats et autres titres obtenus dans un pays membre devront être reconnus en France, dès lors qu'ils seront accompagnés d'un certificat de conformité à la directive émis par le pays d'obtention », précise la directive. Une commission est chargée de rendre un avis sur la demande d'autorisation d'exercice formulée par un ressortissant communautaire. Elle doit examiner non seulement les diplômes obtenus par le candidat en dehors de l'UE dès lors qu'ils ont été reconnus par un autre Etat membre, mais aussi l'expérience professionnelle acquise. La directive précise qu'elle « ne devrait pas empêcher les États membres d'instaurer entre eux, pour certaines spécialisations médicales et dentaires qui leur sont communes, une reconnaissance automatique selon des règles qui leur sont propres ».
« Enjeu de société ».
« Nous sommes dans une ère d'ouverture et de construction européenne dans de nombreuses disciplines et il est indispensable qu'elle intègre le monde de la santé. C'est un enjeu de société », commente Guillaume Muller. Le président de l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf) pense que l'ouverture des frontières offre de nouvelles perspectives aux étudiants. « Avec la récente parution du décret sur le cabinet secondaire, on peut imaginer qu'à l'avenir un médecin du nord-est de la France pourra exercer un ou deux jours par semaine dans un second cabinet en Allemagne », analyse l'étudiant nantais. Les conditions pour bénéficier de « reconnaissance automatique » des titres de formation de médecin sont claires. Le candidat doit bien sûr être titulaire d'un diplôme de médecine et avoir suivi une formation d'au moins six années d'études ou suivi 5 500 heures d'enseignement théorique et pratique dans une université. D'aucuns ne manquent toutefois pas de soulever les risques que pourrait entraîner la reconnaissance systématique des diplômes de médecine obtenus dans des pays d'Europe de l'Est. « La question est de savoir si le niveau d'études requis en Roumanie ou en Hongrie est suffisant pour obtenir une reconnaissance en France, explique Guillaume Muller . Ne faisons pas de procès d'intention et laissons les instances en charge de cette mission faire leur travail. »
Dans certains pays d'Europe, la reconnaissance automatique des qualifications pose problème. En avril, plusieurs facultés de médecine grecques ont été paralysées par des grèves d'étudiants en colère. Des centaines de leurs concitoyens recalés en Grèce partaient effectuer leur première année en Pologne ou en Hongrie et revenaient en Grèce l'année suivante afin de poursuivre leurs études, une information rapportée par « Courrier international » dans son numéro du 7 avril.
En France, l'Europe est globalement bien perçue par les étudiants en médecine. Ces derniers sont de plus en plus nombreux à franchir les frontières pendant leur formation pour effectuer un stage dans des facultés européennes. Une vingtaine de carabins de l'université Paris-VII sont ainsi partis cette année dans un pays de l'Union européenne pour une durée de trois mois à un an avec Erasmus. Les échanges bilatéraux d'étudiants en troisième ou quatrième année séduisent également chaque année davantage de candidats. Cette année, plus de 250 Français vont profiter du programme de la Fédération internationale des associations d'étudiants en médecine (Ifmsa), qui fédère plus de 80 pays, dont l'Italie, l'Allemagne, la Grande-Bretagne, l'Espagne, la Suède, la Norvège... Les facultés membres de l'Ifmsa s'engagent à accueillir et à loger les étudiants pendant les deux à trois mois que dure l'échange. « Ces stages sont très appréciés car ils permettent de découvrir un pays, une culture, mais aussi un autre système de santé », commente Sophie Bardenet, chargée des échanges universitaires à l'Anemf. Par ailleurs, certaines facultés établissent des conventions spécifiques avec des établissements de pays voisins. S'inspirant du programme Erasmus, la faculté de Bordeaux participe à un projet pilote de cursus médical européen. Baptisé Triamed, il permet à neuf étudiants français, italiens et espagnols de troisième année de poursuivre leurs études à Saragosse, Pavie et Bordeaux (« le Quotidien » du 4 novembre 2004).
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