IL Y A DEUX ANS, pour la détection de la drogue au volant, de «gros espoirs» reposaient sur le test salivaire. Un appel d'offres a même été lancé au printemps 2006 par le ministère de l'Intérieur, en vue de tourner la page du test urinaire. La méthode actuelle – qui exige la présence d'un médecin et, lors d'un résultat positif, une prise de sang, par ailleurs indispensable en cas de poursuites – était considérée comme lourde et coûteuse. Depuis, il y a eu le rapport Rosita, remis à la Commission de Bruxelles à la fin de 2006. «Des experts européens y affirment qu'il n'y a aucun test salivaire reconnu fiable, dit au « Quotidien » le Dr Charles Mercier-Guyon, du Centre d'études et de recherches en médecine du trafic. Le meilleur existant à ce jour n'est efficace qu'une fois sur deux.» «Aussi, poursuit le généraliste, membre de la Commission nationale des stupéfiants et des substances psychotropes (Cnssp), existe-t-il deux bonnes raisons de ne pas franchir le pas. Tout d'abord, on ne peut pas appuyer une recherche de preuve sur une méthode non fiable.»
Dans l'Etat australien de Victoria, le test salivaire sert à des opérations de sensibilisation en direction des usagers de boîtes de nuit et cède la place au test urinaire quand interviennent des dommages causés à un tiers. En second lieu, depuis la loi du 3 février 2003, qui instaure un délit de conduite sous l'emprise de cannabis, de cocaïne, d'amphétamines ou d'opiacés, sont apparus sur le marché de nouveaux produits qui nécessitent une détection pertinente. Il s'agit de Subutex et de méthadone détournés de leur usage thérapeutique, de substances synthétiques comme le GBH, de la kétamine et autres dérivés de champignons hallucinogènes. Ils entrent désormais pour «au moins 20%» dans les comportements toxicomaniaques au volant.
Une prise de sang pour toute altération du comportement.
«C'est à nous de donner aux forces de l'ordre les moyens d'être vigilants et efficaces face aux conducteurs ayant des capacités affaiblies», souligne le médecin. Or le test urinaire combiné à la prise de sang constitue, pour l'instant, le procédé le plus approprié pour évaluer les facteurs chimiques induisant un état incompatible avec la conduite, affirment les experts européens. «Il est même indispensable, selon le Dr Guyon-Mercier, qu'un automobiliste présentant un état d'altération très important, alors que le test urinaire se révèle négatif, fasse systématiquement l'objet d'une prise de sang.» Le praticien en fera la proposition à la Cnssp, avant que l'instance consultative interpelle à son tour les autorités, à l'automne prochain.
Selon l'étude « Stupéfiants et accidents mortels de la circulation routière » (2005), coordonnée par l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies, sur une base annuelle de 6 000 accidents mortels de la route entre octobre 2001 et septembre 2003, le nombre de victimes dues aux cannabis est de 230 morts. Conduire sous l'effet de joints double le risque d'être responsable d'un accident mortel, et, si on associe le cannabis à l'alcool, le danger est multiplié par quinze.
Onze pour cent des conducteurs de moins de 25 ans prennent le volant après avoir fumé un joint, contre 2,9 % pour l'ensemble des automobilistes.
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