École le matin, activités sportives et culturelles l’après midi… Cet emploi du temps plutôt séduisant à première vue sera-t-il bientôt le quotidien des petits écoliers français, à l’image de ce qui se fait déjà dans de nombreux pays européens ? Si la question se pose de nouveau avec force, depuis le lancement de la conférence nationale sur les rythmes scolaires (voir encadré), rien n’est pour le moment décidé. Une chose est sûre en tout cas : les avis sont partagés et la bonne santé de l’enfant n’est pas toujours au centre des réflexions.
La polémique sur les rythmes scolaires et leur impact sur la santé de l’enfant, sa qualité de vie et ses performances scolaires n’est pas nouvelle. « L’aménagement du calendrier scolaire a été l’objet de nombreuses modifications successives, avec l’apparition dans le milieu des années quatre-vingt de la notion des rythmes de l’enfant dans le débat » rappelait récemment l’Académie Nationale de Médecine dans son rapport sur l’aménagement du temps scolaire et santé de l’enfant (1).
Le spectre de la désynchronisation
On sait en effet depuis une trentaine d’années que, chez l’enfant comme chez l’adulte, un grand nombre de fonctions physiologiques, comme la température corporelle ou la sécrétion de cortisol et de mélatonine, répondent à une rythmicité circadienne sur 24 heures Ces rythmes biologiques circadiens apparaissent au cours des premiers mois de vie du nourrisson en même temps qu’un rythme veille sommeil stable (2). Ils relèvent de deux composantes : l’une endogène génétiquement déterminée, l’autre exogène en rapport avec certains facteurs de l’environnement appelés donneurs de temps ou synchroniseurs. Dans l’espèce humaine, ces synchroniseurs sont avant tout de nature environnementale, comme les alternances lumière obscurité et veille sommeil. « À cet égard il faut souligner d’une part l’importance du sommeil dans la structuration des rythmes circadiens [voir ci dessous], et d’autre part celle de la lumière dans l’entraînement du système circadien chez l’homme » souligne le rapport de l’Académie. A ces synchroniseurs naturels de l'environnement s'ajoutent pour l'enfant le rythme de vie de ses parents et les contraintes institutionnelles au premier rang desquelles les rythmes scolaires. Lorsqu'il existe un décalage entre l'horloge biologique et l’environnement, apparaît une désynchronisation avec son cortège de troubles atypiques tels que fatigue, mauvaise qualité du sommeil, mauvaise humeur ou encore troubles de l’appétit.
« La semaine de 4 jours doit disparaître »
D’où la nécessité martelée par les chronobiologistes de faire concorder emploi du temps de l’enfant et rythmes biologiques. À ce titre l’aménagement du temps scolaire tel qu’il est proposé actuellement en France semble peu adapté. « Pour tenir compte des données biologiques il faudrait une année scolaire de 180 à 200 jours (contre 144 jours actuellement), 4 à 6 heures de travail par jour selon l’âge de l’élève, 4 jours et demi à 5 jours de classe par semaine en fonction des saisons ou des conditions locales » estime l’Académie. Un tableau loin de la réalité actuelle des écoliers français qui cumulent journées scolaires les plus longues du monde, nombre annuel d’heures d’enseignement parmi les plus élevés répartis sur un faible nombre de jours de classe par an et par semaine.
La semaine de 4 jours, en vigueur depuis 2008, fait particulièrement grincer les dents des spécialistes qui lui reprochent de favoriser l’irrégularité du sommeil (lire ci-dessous). Avec à la clef désynchronisation et diminution de la vigilance de l'enfant les lundis et mardis. « De mon point de vue, la semaine de 4 jours doit donc disparaître » estime le Pr Yvan Touitou, co-rapporteur du rapport de l’académie de médecine et membre du comité de pilotage de la conférence nationale sur les rythmes scolaires.
Autre aberration pointée par les chronobiologistes : alors que les études menées en France en chronopsychologie scolaire montrent que l'activité intellectuelle et la vigilance des élèves fluctuent au cours de la journée, la journée de classe type prend peu en compte ces variations. On sait pourtant que « l'enfant arrive fatigué à l'école (8 h 30) quelle que soit la durée de son sommeil la nuit précédente, puis qu’il va augmenter progressivement ses capacités d'attention et d'apprentissage dans la matinée avec un pic vers 10 – 11 heures, pour les diminuer à nouveau en début d'après-midi et redevenir performant vers 15 – 16 heures ». Autant d’éléments qui devraient être pris en compte dans la programmation des activités scolaires et périscolaires.
À ce titre, les expérimentations menées depuis la rentrée dans une centaine d’établissements « vont plutôt dans le bon sens estime le Pr Touitou dans la mesure où cela rentre dans un système où l’enfant n’est pas confronté l’après midi à des matières prenantes sur le plan de la vigilance ». Dans ces classes pilotes, les enfants bénéficient de cours le matin et d’activités sportives et culturelles l’après midi.
Au lycée Jean-Vilar de Meaux où l’expérience a débuté dès Janvier, 2010, les premiers retours des familles, proviseur et professeurs sont plutôt positifs, faisant état « d'enfants plus détendus le soir quand ils rentrent à la maison" avec un gain "en qualité de vie dans la classe... »
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