«LES CHOSES commencent à changer et la lutte contre la fumée porte peu à peu ses fruits»: c’est la «bonne nouvelle» apportée par une vaste étude internationale dont les conclusions sont publiées aujourd’hui dans le « Journal européen de pneumologie »*.
L’enquête Ecrhs (European Community Respiratory Health Survey) a été menée auprès de 9 000 personnes dans 29 centres de recherche de 14 pays (12 pays européens, l’Australie et les Etats-Unis), interrogés une première fois au début des années 1990, puis à nouveau dix ans plus tard. Le résultat est particulièrement encourageant en ce qui concerne le tabagisme passif : il touchait 40,6 % de la population étudiée entre 1990 et 1994, et ne concerne plus aujourd’hui que 24 % des gens, une diminution de 40 %. Alors que la France hésite à interdire le tabac dans tous les lieux accueillant le public, y compris les bars et les restaurants, «il est désormais très politiquement incorrect d’enfumer son voisin», souligne un communiqué du journal de pneumologie. «Cette diminution s’explique en partie par les mesures législatives prises dans différents pays d’Europe, mais aussi par un changement d’attitude très net, commente le premier auteur de l’article, Christer Janson (université d’Uppsala, Suède). Les gens sont en effet aujourd’hui dans un meilleur état d’esprit, sans doute grâce à une plus large prise de conscience des effets néfastes du tabagisme passif.»
La baisse du tabagisme actif est moins spectaculaire mais reste sensible : la proportion de fumeurs est passée de 33,9 à 28,7 %, soit une diminution de 15 %. Les résultats sont variables d’un pays à l’autre. En Estonie (centre de Tartu), il y avait davantage de fumeurs lors de la deuxième enquête (43,9 % contre 30,7 %). Une augmentation qui, selon les auteurs, «pourrait être liée aux importants changements socio-économiques qui ont suivi l’éclatement de l’Union soviétique, ainsi qu’aux fortes activités de marketing que l’industrie du tabac a déployées dans ces pays».
Une autre différence est à souligner : la proportion de fumeurs a moins reculé chez les femmes (de 4,5 %) que chez les hommes (7,5 %). La crainte d’une prise de poids pourrait être un frein, ce que confirme le fait que les femmes en surpoids (indice de masse corporelle entre 25 et 30) ont deux fois moins tendance à arrêter de fumer. La diminution du tabagisme actif est aussi plus marquée chez les plus de 30 ans.
Inégalités de santé.
Plusieurs facteurs sociaux jouent aussi un rôle. Il est plus difficile d’arrêter de fumer lorsque l’on vit ou travaille avec des fumeurs : s’il y a un autre fumeur à la maison, les chances d’arrêter de fumer sont diminuées de 55 % ; et si l’on travaille dans un environnement fumeur, la chance d’arrêter est inférieure de 30 % par rapport aux personnes dont le lieu de travail est sans fumée. Enfin, les personnes qui ont le niveau d’éducation le plus bas sont 30 % moins nombreux à avoir cessé de fumer que ceux qui ont bénéficié d’une bonne formation. Les stratégies de prévention devraient donc viser en priorité ces personnes, estime Christer Janson. Et de conclure en nuançant son optimisme : «Cette évolution dans les pays développés montre qu’à propos du tabagisme, tant actif que passif, on va vers un accroissement encore plus marqué des inégalités sociales face à la santé.»
* « European Respiratory Journal », vol. 27, n° 3.
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