Salves
Les crises sont caractérisées par de brusques et brèves contractions de tout le corps, habituellement en flexion (flexion de la nuque et du tronc, des cuisses sur le tronc, adduction et flexion des membres supérieurs). « Toute contraction constituant une flexion vers l'avant de l'ensemble du corps, surtout par salves, devra immédiatement alerter et faire évoquer un syndrome de West », explique le Pr Evrard. Parfois les membres inférieurs ou les membres supérieurs ou tout le corps se portent en extension ; exceptionnellement les contractions sont unilatérales. Fait capital, les spasmes surviennent le plus souvent par salves de 4 ou 5 contractions, parfois plus. Au décours de la crise, il arrive qu'il y ait un cri, des pleurs, ou plus rarement, un rire, et il peut exister une brève période de moindre réactivité.
Bien que l'aspect des spasmes soit relativement typique, leur caractère pathologique n'est pas toujours immédiatement reconnu par les parents qui peuvent penser qu'il s'agit de sursauts ou surtout de coliques. Ainsi plusieurs semaines ou plusieurs mois s'écoulent souvent avant que le diagnostic soit véritablement établi.
EEG caractéristique
L'électroencéphalogramme, qui résume à lui seul les examens paracliniques pour la confirmation du diagnostic de spasmes infantiles, est presque toujours profondément perturbé. Le tracé intercritique caractéristique désigné sous le nom d'hypsarythmie consiste, sur les deux hémisphères, en un mélange d'ondes lentes de très haut voltage entrecoupées d'ondes aiguës et de pointes irrégulièrement réparties de façon asymétriques et asynchrones. Pendant le sommeil, pointes et pointes-ondes se groupent en paroxysmes plus synchrones, séparés par des segments d'aplatissement donnant parfois un aspect pseudo-périodique. Les spasmes se traduisent en général par un aplatissement transitoire du tracé. D'autres aspects moins caractéristiques sont possibles.
Puis les anomalies EEG vont se modifier avec l'âge ; on pourra voir apparaître des bouffées paroxystiques synchrones voisines de celles que l'on voit dans le syndrome de Lennox-Gastaut. « Quoi qu'il en soit, l'EEG est presque constamment perturbé dans le syndrome de West », précise le Pr Evrard « et l'absence confirmée de toute anomalie électrique doit le plus souvent faire réfuter le diagnostic. »
Régression psychomotrice
L'une des particularités les plus redoutables du syndrome de West est de s'accompagner d'arrêt ou de régression du développement mental, que les nourrissons aient été sains jusque-là ou non. « La régression psychomotrice est constante après un certain délai. » Lorsqu'un déficit intellectuel préexiste aux crises, celles-ci entraînent habituellement son aggravation. C'est parfois la stagnation psychomotrice, et non les spasmes, qui motive la consultation. Parfois, surtout en début d'évolution, les signes de régression sont minimes mais identifiables par les parents (perte du contrôle de la tenue de la tête, de la préhension volontaire, de la poursuite oculaire). Occasionnellement, le peu de réponse aux stimulations visuelles peut faire croire à une cécité.
Un traitement précoce et intense des crises sera de nature à empêcher l'apparition ou l'aggravation de troubles intellectuels.
Un diagnostic souvent tardif
L'âge de début, la survenue en « salves » des spasmes accompagnés de signes de régression, et l'aspect de l'EEG sont donc les trois piliers du diagnostic du syndrome de West.
Les spasmes musculaires peuvent, pendant un temps, passer inaperçus ou être interprétés comme des réactions normales de sursauts, des myoclonies physiologiques et surtout des coliques, ou n'être découverts que devant une régression psychomotrice récente. Souvent plusieurs semaines ou un à deux mois s'écoulent avant que le diagnostic de ce syndrome ne soit fait. « Une regrettable erreur extrêmement fréquente est de mettre ces manifestations sur le compte d'un reflux gastro-œsophagien », avertit le Pr Evrard.
Les manifestations paroxystiques non épileptiques pouvant évoquer les spasmes infantiles se rencontrent dans le myoclonus bénin du nourrisson (mais il n'y a pas de régression psychomotrice et l'EEG est normal), le syndrome de Sandifer, le syndrome de déviation tonique du regard vers le haut, le spasmus nutans et l'hyperekplexia.
Les manifestations de nature épileptique, surtout les myoclonies, peuvent évoquer des spasmes. Compte tenu de l'âge, le diagnostic différentiel doit surtout se faire avec l'épilepsie myoclonique bénigne du nourrisson. L'aspect de l'EEG, critique et intercritique, de veille et de sommeil et l'absence de signes de régression, permettent le diagnostic différentiel.
Evolution
Même sans traitement, les spasmes disparaissent spontanément en quelques mois mais d'autres manifestations épileptiques peuvent survenir par la suite ; le déficit cognitif, lui, reste permanent.
Le diagnostic et la mise en route d'un traitement antiépileptique doivent se compléter par une recherche méticuleuse d'une éventuelle étiologie sous-jacente. Les causes à l'origine de spasmes infantiles sont nombreuses et conditionnent en partie l'évolution.
Selon les écoles et les régions du monde, les traitements le plus souvent utilisés en début de l'évolution, seuls ou en diverses associations, sont le vigabatrine, certaines benzodiazépines (nitrazépam), l'ACTH, les corticoïdes oraux, la pyridoxine. « Cependant, la complexité de la pathologie fait que nous disposons de peu d'études contrôlées sur le meilleur premier choix, les doses les plus adéquates et la durée du traitement en cas d'efficacité. » Le choix du traitement reste donc encore aujourd'hui controversé, mais quel qu'il soit, il améliore l'évolution et l'impression prévaut nettement que les résultats sont d'autant meilleurs que le traitement aura été institué tôt ; on peut donc considérer le traitement du syndrome de West comme une urgence, d'où l'importance de poser le diagnostic le plus précocement possible et de confier sa prise en charge à des équipes de neurologie pédiatrique.
Etiologie
Le syndrome de West est l'un des plus remarquables exemples d'épilepsie liée à l'âge. On distingue des formes idiopathiques qui surviennent chez le nourrisson cliniquement normal et sans anomalie cérébrale radiologiquement (et anatomiquement) décelable, et les formes symptomatiques ou secondaires. Pratiquement tous les types de lésions cérébrales peuvent induire des spasmes infantiles, notamment les encéphalopathies ischémiques péri- ou prénatales, les malformations cérébrales, des maladies métaboliques et la sclérose tubéreuse de Bourneville qui doit toujours être suspectée (recherche de taches achromiques sur la peau du tronc et des membres). Il arrive qu'aucune cause ne soit retrouvée à l'encéphalopathie précédant les spasmes (formes cryptogéniques).
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