Entre 85 et 90 % des patients ont une SEP sous une forme rémittente, évoluant par poussées entrecoupées de rémissions. Les épisodes d'exacerbation sont imprévisibles, mais il est communément admis qu'ils dépendent de mécanismes immunitaires. Des infections respiratoires hautes et l'accouchement représentent deux facteurs précipitants identifiés. Qu'en est-il du stress psychologique et des événements de vie ressentis comme stressants par les patients ? Une étude longitudinale prospective apporte un éclairage sur cette question déjà débattue. Elle répond que, dans la cohorte étudiée, un événement vécu comme stressant double le nombre de poussées dans les quatre semaines qui suivent sa survenue.
Le travail a été mené dans un centre unique entre juillet 1997 et décembre 1999 (dans le cadre de la Rotterdam Study). Ont été inclus des patients âgés de 18 à 55 ans souffrant de SEP rémittente, ayant eu au moins deux exacerbations en vingt-quatre mois, et qui pouvaient marcher au minimum avec une canne ou, mieux, sans.
La rédaction d'un journal
Pendant le suivi, on a confié aux 73 patients retenus pour l'inclusion la rédaction d'un journal dans lequel ils ont reporté 457 événements qu'ils ont vécus comme stressants (lire encadré), ainsi que les infections intercurrentes : coryza, angine, symptômes grippaux, myalgie, fièvre, diarrhée ou infection urinaire durant plus de vingt-quatre heures ont été pris en compte.
Une exacerbation a été définie comme « une aggravation de symptômes existants ou bien l'apparition de nouveaux symptômes d'une durée de plus de 24 heures et après au moins 30 jours d'amélioration ou de stabilité ».
Les résultats montrent que, en 1,4 an, 70 patients du groupe (96 %) ont rapporté au moins un événement de vie stressant non causé par la SEP. En outre, 136 infections ont touché 57 patients et 134 exacerbations sont survenues chez 56 patients.
L'analyse par régression de COX, prenant en compte des variables dépendantes du temps, donne comme résultat un risque relatif de poussée de SEP de 2,2 (IC de 1,2 à 4, p < 0,014) pendant le mois qui suit le stress. L'association se révèle indépendante de l'effet déclencheur des infections ou des exacerbations de la SEP.
La validité des résultats est attestée par le fait que l'augmentation du risque est également observée pour une seconde exacerbation. En outre, les infections sont associées à une multiplication par trois du risque d'exacerbation. L'analyse poussée fait observer que ces deux facteurs de risque, infections et stress psychologique, sont indépendants. « Cela implique que le risque d'une première exacerbation chez des patients soumis aux deux facteurs est augmenté de 6,4 fois, comparativement à ceux qui n'ont aucun des deux facteurs. »
Le mécanisme sous-jacent au stress et à l'induction de l'activité inflammatoire n'est pas complètement élucidé. Une modulation simultanée de l'axe hypophyso-hypothalamo-surrénalien et du système sympathique peut avoir un effet significatif sur les réactions inflammatoires dépendantes des lymphocytes, par une modulation de la production de cytokine et des récepteurs adrénergiques exprimés par les lymphocytes.
Quantifier les paramètres neuroendocriniens
Il serait intéressant maintenant de quantifier les paramètres neuroendocriniens dans des échantillons sanguins : adrénaline, cortisol, expression lymphocytaire de récepteurs neuroendocrines.
Certains types de stress psychologique peuvent supprimer les réactions immunitaires, ce qui entraîne une augmentation de la susceptibilité aux infections. Toutefois, notent les auteurs, cela n'est pas trouvé dans ce travail : « Nous n'avons aucune démonstration d'une augmentation des infections après des événements de vie stressants. »
« La notion d'une association entre le risque d'exacerbation de la SEP et des stress de la vie est une information importante tout autant pour les médecins que pour les patients, sur cette maladie imprévisible. »
D. Buljevac et coll. « British Medical Journal »», vol. 327, 20 septembre 2003, pp. 646-649.
Les événements stressants
Les patients de l'étude danoise ont rapporté comme pourvoyeurs de stress les événements suivants : maladie ou problèmes avec un membre de la famille proche (107) ; un stress au travail (54) ; des événements en relation avec l'habitation ou la voiture comme réparation, vol... (52) ; un événement de santé survenu brutalement sans rapport avec la SEP (52) ; le décès d'un parent ou d'un ami éloigné (35) ; des problèmes pécuniaires (31) ; le décès d'un membre proche de la famille (29) ; une maladie ou des problèmes survenant avec un parent éloigné ou un ami (28) ; la maladie ou la mort d'un animal familier (27) ; des problèmes dans le couple (24) ; un stress lié aux vacances (18).
Ce qui fait un total de 457 événements stressants.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature