Une nouvelle donnée de l’étude de cohorte de la Mgen

Le sport contre le cancer du sein

Publié le 23/01/2006
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L’ANALYSE est différente de celles déjà publiées sur la fameuse cohorte de l’étude E3N. Comportant près de 100 000 adhérentes de la Mgen (Mutuelle générale de l’Education nationale), elle est plutôt connue pour étayer les données sur le risque de cancer du sein et le traitement hormonal substitutif de la ménopause. Cette fois, l’équipe de Françoise Clavel-Chapelon (Inserm, institut Gustave-Roussy, Villejuif) s’est attachée à évaluer l’impact de l’activité physique sur le risque de survenue d’un cancer du sein. En fait, si l’effet protecteur est déjà connu, les chercheurs français ont réussi à en chiffrer les niveaux, tant chez les femmes tout-venant que chez celles réputées à risque (surpoids, nullipares, THS, antécédent familial). Pour y parvenir, les chercheurs ont utilisé des coefficients de dépense énergétique, en utilisant comme intensité 1 la position assise (voir tableau).

Une décroissance linéaire.

L’analyse a été menée auprès de 90 509 femmes de la cohorte entre 1990 et 2002. Elles avaient entre 40 et 65 ans à l’enrôlement en 1990. Tous les deux ans environ, elles ont répondu à un questionnaire, comportant notamment des items sur leur activité physique. Dans la cohorte, 3 424 cancers du sein ont été relevés sur cette période.

Il existe bien une décroissance linéaire entre le risque de cancer du sein et l’élévation de la dépense physique pour des taux modérés et élevés. En opposant les femmes ne se dépensant pas, celles pratiquant plus de cinq fois par semaine une activité de loisir à dépense physique, le risque relatif apparaît abaissé chez ces dernières à 0,62.

Le détail montre que celles rapportant au moins quatorze heures de travaux ménagers légers par semaine ont une diminution non significative du risque par rapport aux « inactives » (RR = 0,82). L’analyse a été également stratifiée selon les facteurs de risque.

En ce qui concerne l’IMC, l’activité ne semble pas avoir d’effet protecteur chez les femmes en surpoids, les chiffres n’atteignent pas le seuil de significativité. Sauf en cas d’activité importante, où le risque relatif s’abaisse à 0,71.

En cas d’antécédent familial de cancer du sein, ici aussi, le rôle de l’activité physique ne semble pas certain. A cela près qu’elle semble offrir davantage de protection dans cette population que parmi les femmes sans antécédents. Là encore, les chiffres n’atteignent pas le seuil de la significativité.

Qu’en est-il des nullipares ? L’activité physique intense est bénéfique, avec un RR de 0,42 pour les plus sportives par rapport aux modérément actives ou inactives.

A propos des femmes sous THS, enfin, celles qui « bougent » beaucoup voient leur risque relatif s’abaisser à 0,70, par rapport à celles peu ou pas actives.

Soutenue au-delà du niveau 6.

La définition du seuil d’activité est établie selon les données du tableau ci-contre. La dépense est considérée comme légère en dessous de 3, modérée entre 3 et 6, comme soutenue au-delà du niveau 6.

F. Clavel-Chapelon et son équipe admettent certaines limites à leur travail. La première porte sur la méthodologie : évaluation de la dépense énergétique par autoquestionnaire ; questions fondées sur des catégories préétablies ; utilisation de valeurs d’intensité, plutôt que réelle mesure. Autre limite, le manque d’informations sur les apports énergétiques. Ils ont été inclus à l’étude entre 1993 et 2002. Comme ils n’ont pas modifié l’analyse statistique des femmes concernées, les chercheurs ne les ont pas considérés comme une source potentielle d’erreur. Quand il s’agit de proposer une explication biologique à ces constats, seulement quelques hypothèses sont soulevées. Avec la dépense physique, le taux de stéroïdes endogènes diminue, la prise de poids est mieux contrôlée, les niveaux circulants d’insuline et d’Insulin Growth Factor 1 (IGF-1) sont modifiés, et, enfin, les mécanismes immunitaires sont stimulés.

« Cancer Epidemiology, Biomarkers and Prevention », janvier 2006.

Exemples d’activités et coefficients associés (fourchettes selon l’intensité)

Station assise 1    
Cuisiner 2 Danse 4,5
Ménage 2,5 à 4 Jogging en salle 4,5
Bricolage 3 à 5 Jardinage 3 à 6
Arts martiaux 10 Tennis 5 à 8
Marcher 2 à 3 Squash 12
Yoga-Gym douce 2,5 à 3,5 Jogging en extérieur 8
Aquagym 4 Faire du vélo 4 à 10
Natation 4 à 11 Aviron 3,5 à 8,5
D’après Ainsworth 2003.
> Dr GUY BENZADON

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7883