Il en rêvait depuis des années, il se référait souvent à ce long fleuve intranquille et à son poète d'auteur : Olivier Py a attendu et, la saison dernière, il s'est senti assez bien armé pour aborder « Le Soulier de satin », de Paul Claudel. Création à Orléans où il dirige le centre dramatique, reprise à Strasbourg chez son camarade Stéphane Braunschweig et, depuis quelques jours, représentations au théâtre de la Ville. La distribution réunie - Jeanne Balibar, Philippe Girard, Miloud Khétib, pour le trio de Prouhèze, Rodrigue, Camille et d'autres interprètes excellents tel John Arnold - souligne le désir du metteur en scène de ne pas étouffer le lyrisme magnifique de l'uvre qu'il présente dans une scénographie sur laquelle il a veillé, comme d'habitude.
Nous vous reparlerons plus longuement de ce spectacle qui ne se donne plus que pour quelques représentations : mais le public n'a pas attendu les critiques pour réserver ses places et il est très réconfortant de savoir que les salles sont pleines, que « Le Soulier de satin » se donne en intégrale ou en deux parties. Après la création par Jean-Louis Barrault et les différentes reprises qu'il en fit, après la version de 1986 par Antoine Vitez, après le film superbe de Manoel de Oliveira, on est heureux de découvrir la version d'Olivier Py, l'un des vrais lecteurs de Claudel, aujourd'hui.
Théâtre de la Ville, en semaine en deux parties et le samedi et le dimanche à partir de 13 h en représentation intégrale des quatre journées (01.42.74.22.77). Et n'oubliez pas que Jean-Luc Jeener propose jusqu'à la fin de l'année une intégrale Claudel, très intéressante : des metteurs en scène, des compagnies, des inspirations très diverses, mais toujours loyales et dignes d'intérêt.
« Le Maître et Marguerite »
Le théâtre de l'Europe, soit l'Odéon aux Ateliers Berthier, met à l'affiche en ce tout début de saison un spectacle de plus de 8 heures. Une adaptation par le metteur en scène polonais Krystian Lupa du chef-d'uvre de Mikhaïl Boulgakov, « Le Maître et Marguerite ». Le spectacle se donne soit en deux soirées de 4 h et 4 h 15 soit en une longue après-midi et soirée les samedi et dimanche, dans une scénographie de Lupa lui-même qui signale également qu'il est l'auteur des « apocryphes ».
Krystian Lupa bénéficie d'une très grande réputation à Paris, notamment pour avoir présenté une longue adaptation des « Frères Karamazov » et aussi sa version d'« Extinction ». Le public l'a suivi et l'on dit les représentations des Ateliers Berthier complètes, ce qui est heureux.
On regrette pourtant qu'une telle production ne bénéficie pas de l'accompagnement qu'elle mériterait d'un point de vue du soutien du spectateur. On défie qui que ce soit de parvenir à lire sans effort, sans difficulté grande, les surtitres gris sur gris dans un environnement gris et très éclairé. Sans doute certains spécialistes de Boulgakov ont-ils le roman suffisamment en tête pour repérer non seulement l'enjeu des scènes mais le va-et-vient des dialogues sans l'aide d'une traduction...
Lupa a découpé en séquences d'une heure dix environ son adaptation : pourquoi l'Odéon n'a-t-il pas composé un suivi écrit des différentes parties ? Ce serait un appui simple pour le spectateur.
Telle qu'on la devine pourtant, l'adaptation de Lupa, soutenue par le jeu puissant de plus de trente interprètes, si elle est linéaire, si elle échoue à donner simultanément tous les plans du récit - ce que son confrère allemande Kastorf avait magistralement réussi l'an dernier avec un spectacle plus bref mais usant d'images, de vidéo, de caméras, d'écran, etc. - est fidèle et tendue - malgré ses longueurs et pour tout dire ses langueurs. Il y a là un travail puissant, une troupe formidable. Mais que veut dire « assister » à un spectacle dont on n'entend pas un mot ? Ici, connaître l'histoire ne suffit pas. Elle est bien trop diabolique. Et comme Krystian Lupa est sévère, refuse toute « belle » image pour décortiquer le sens, le faire exploser, le spectateur qui n'entend pas le polonais est très, très, très démuni.
Ateliers Berthier, première partie, 4 h avec deux entractes de 20 minutes; deuxième partie, 4 h 15 avec deux entractes de 20 minutes chacun. Lorsque le spectacle se joue en intégrale les samedi et dimanche, il y a une pause d'une heure entre les deux grandes parties. En langue polonaise avec surtitres. Jusqu'au 5 octobre (01.44.85.40.40).
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature