Les chirurgiens de la main de l'Ile-de-France ont profité du Congrès annuel de la Société française de chirurgie de la main (SFCM), qui s'est déroulé à Paris du 12 au 14 décembre, pour alerter leurs confrères sur la menace de fermeture qui plane sur les services d'urgences de la main franciliens.
Jusqu'à présent, la prise en charge des urgences main était assurée par deux établissements de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), l'hôpital Bichat et l'hôpital européen Georges-Pompidou. Mais à la suite du départ en retraite des chefs de ces deux services SOS-Mains, le service de Bichat va fermer quinze jours pendant les fêtes, moment où les accidents culminent, tandis que celui de l'hôpital Pompidou va définitivement fermer en 2003. A cela s'ajoutent les problèmes liés à la pénurie de médecins, à la réduction du temps de travail et l'attractivité du privé, problèmes que connaissent aussi les autres activités chirurgicales. La situation sera donc critique en 2003 pour les 40 000 accidentés parisiens annuels, qui auront le choix entre deux cliniques intramuros mais fermées la nuit, ou trois autres établissements (Pontault-Combault, Longjumeau et Aubergenville), à une bonne heure de route du centre de Paris.
Dans un communiqué, l'AP-HP précise que la chirurgie de la main demeure « un objectif prioritaire », et indique qu'elle examine les solutions aux difficultés rencontrées, parmi lesquelles « la mutualisation des moyens de ses équipes et la mise en place d'un système de gardes alternées pour assurer la continuité des gardes 24 heures sur 24 ». Une déclaration qui ne satisfait pas le Dr Francis Chaise, secrétaire général de la Société française de la chirurgie de la main (SFCM) : « Assurer la garde à Bichat un jour, puis à Pompidou le lendemain, n'est pas une bonne solution ; cela conduira à une réduction considérable des moyens mis à la disposition des patients. »
Pour le Dr Chaise, la réorganisation de l'activité de la chirurgie de la main en Ile-de-France illustre un phénomène plus général. « Depuis quelques années, les hôpitaux publics se défont de leur mission de prise en charge des urgences de la main. Le CHU de Nantes, par exemple, a cessé toute activité il y a un an ; depuis, la totalité des urgences main sont assurées par la clinique privée où j'exerce. » Cette clinique vient d'obtenir l'accréditation POSU (pôle spécialisé d'urgence) pour le service chirurgie de la main. En échange d'un versement de 460 000 euros annuels, le POSU s'engage à prendre en charge la totalité des urgences main du département. Si les hôpitaux se désengagent de leur mission de service public (pour l'heure, 50 % des urgences sont traitées par les hôpitaux et 50 % par les cliniques), il est urgent de développer ce type de financement pour le privé, insiste le Dr Chaise. Or, seulement trois des 41 centres SOS-Mains* (Nantes, Bordeaux et Dijon) sont aujourd'hui accrédités POSU.
Outre le manque important de moyens financiers mis à leur disposition, les chirurgiens de la main s'inquiètent de la raréfaction des nouvelles recrues. La France ne compte que 200 hyperspécialistes, dont les deux tiers consacrent une partie de leur temps à la chirurgie plastique et orthopédique. La spécialisation technique demande une longue formation en microchirurgie, en chirurgie orthopédique, plastique et vasculaire. Or les médecins-enseignants ne sont pas légion, regrette le Dr Chaise.
La RTT a fait exploser les accidents de bricolage
Le développement des réseaux tarde aussi à voir le jour. L'activité non programmée est difficile à maintenir par un chirurgien isolé ; la mise en commun des moyens humains et plateaux techniques permet de faire face aux situations de surcharge de travail et d'imprévu. L'idéal, pour éviter les séquelles, est d'être pris en charge dans les six heures. D'où l'importance de disposer d'opérateurs entraînés au sein de structures équipées et disponibles 24 heures sur 24, ce qui n'est pas toujours le cas.
Les chirurgiens de la main sont d'autant plus inquiets qu'ils assistent depuis trois ans à une explosion du nombre d'accidents domestiques et de bricolage (70 % des accidents de la main), directement liée à l'augmentation du temps libre des Français. « Il faut absolument assurer le renouvellement de nos troupes et nous donner les moyens de travailler. Sinon, cette activité, pourtant indispensable, risque de disparaître dans quelques années », insiste le Pr Guy Magalon, président de la SFCM.
* Coordonnées des 4 centres SOS-Mains disponibles au Numéro Indigo : 0.825.00.22.21.
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