CE TRAVAIL, dont les grandes lignes ont été présentées sous forme de communication affichée au congrès de l'ASCO en 2007, fait partie du programme clinique qui a conduit à l'obtention de l'AMM du sorafénib dans le carcinome hépatocellulaire. Il s'agit d'une étude de phase III en double aveugle contrôlée par placebo, menée par le SHARP Investigators Study Group dans 121 centres de 21 pays. Signalons les chercheurs français qui ont participé à ce travail : M. Beaugrand, J. Bennouna, J.-F. Blanc, J.-P. Bronowicki, F. Degos, S. Dominguez, J.-D. Grange, P. Hillon, J.-L. Raoul et J.-F. Seitz.
Le sorafénib (Nexavar) est une molécule qui inhibe la prolifération de cellules tumorales et l'angiogenèse tumorale, elle accroît le taux d'apoptose dans une grande variété de modèles tumoraux.
Les résultats d'un essai de phase II non contrôlé, incluant 137 patients avec un score A ou B de Child-Pugh, a suggéré que le sorafénib pourrait avoir un effet thérapeutique – survie médiane de 9,2 mois et délai de progression de 5,5 mois. C'est sur la base de ces résultats en phase II qu'a été mis en place un grand essai de phase III randomisé en double aveugle contre placebo pour évaluer l'efficacité et la sécurité d'emploi du sorafénib chez les patients atteints d'un carcinome hépatocellulaire à un stade avancé, confirmé histologiquement. Aucun des patients n'avait reçu de traitement systémique antérieur.
Score A de Child-Pugh.
Les patients étaient considérés comme ayant une maladie à un stade avancé s'ils n'étaient pas éligibles pour un traitement chirurgical ou un traitement locorégional, ou s'ils avaient une progression de leur cancer après ces traitements.
Parmi les autres critères d'éligibilité, signalons : un score ECOG ≤ 2, un score A de Child-Pugh, une espérance de vie de douze semaines ou plus.
Tous les patients éligibles ont été randomisés dans un ratio 1/1 à recevoir par voie orale soit le sorafénib (400 mg deux fois par jour), soit le placebo. Les critères principaux de l'étude étaient la survie globale et le délai de progression symptomatique.
Lors de la deuxième analyse intermédiaire programmée, 321 décès étaient survenus et l'étude a été interrompue. La survie médiane globale était de 10,7 mois dans le groupe sorafénib et de 7,9 mois dans le groupe placebo. Il n'y avait pas de différence statistiquement significative entre les deux groupes en ce qui concerne le délai de progression symptomatique (4,1 mois versus 4,9 mois). Le délai de progression radiologique était de 5,5 mois dans le groupe sorafénib et de 2,8 mois dans le groupe placebo (p < 0,001). Sept patients dans le groupe sorafénib et deux dans le groupe placebo avaient une réponse partielle ; aucun n'avait de réponse complète. Diarrhée, perte de poids, réaction cutanée (mains-pieds) et hypophosphatémie étaient plus fréquentes dans le groupe sorafénib.
«La médiane de survie et le délai de progression radiologique étaient de près de trois mois plus longs pour les patients traités par sorafénib que pour ceux recevant le placebo», concluent les auteurs.
La sélection des patients.
«Cette étude a été conçue pour saisir les bénéfices d'un médicament potentiellement efficace tout en évitant l'effet confondant de décès non liés à la progression du cancer, indiquent les auteurs. Puisque le carcinome hépatocellulaire se développe principalement chez des sujets atteints de cirrhose, il était essentiel de sélectionner des patients ayant des fonctions hépatiques bien préservées (Child-Pugh de classe A). Si l'essai avait inclus des patients ayant une insuffisance hépatique plus avancée (Child-Pugh de classe B ou C), des décès liés à la maladie hépatique avancée auraient pu masquer une activité significative du sorafénib. Des données complémentaires sont nécessaires pour confirmer la sécurité et l'efficacité du sorafénib chez des patients ayant de mauvaises fonctions hépatiques.»
Josep Llovet et coll. « New England Journal of Medicine » du 24 juillet, pp. 378-390.
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