LA PREMIERE RENCONTRE d'un enfant et de sa famille avec une équipe médico-sociale est un événement très particulier, qu'elle se situe dans le cadre d'une surveillance systématique de l'enfant à la suite d'un problème antérieur (prématurité, par exemple) ou qu'elle constitue la procédure d'entrée dans une prise en charge institutionnelle pour un handicap avéré. La qualité du suivi en dépend pour une part. Les consultations conjointes sont un des moyens utilisés pour améliorer ce premier contact. Elles font intervenir deux ou plusieurs professionnels de disciplines différentes, dans des cadres variés (hôpital, PMI, associations, etc.). L'Anecamsp (Association nationale des équipes contribuant à l'action médico-sociale précoce) leur a consacré ses Journées d'étude.
L'expérience retenue ici a dix ans. Elle associe un pédiatre (le Dr Véronique Laplane) et deux psychologues (représentés par l'un d'entre eux, Frank Charpine) et se déroule dans le cadre d'un Camsp (Centre d'action médico-sociale précoce), qui accueille des enfants handicapés et leurs parents très tôt dans leur vie commune. Pour les soignants, son premier objectif est de mettre en place le cadre du suivi. En général, elle n'a lieu qu'une fois au cours de ce suivi, plus par manque de temps chez les thérapeutes que par volonté délibérée. Pour les parents, elle permet de mieux comprendre ce qui arrive à leur enfant ou, pour reprendre les termes de Frank Charpine, « ce qui leur arrive, à leur enfant et à eux-mêmes ». D'ailleurs, note le Dr Laplane, quand le psychologue n'est pas disponible pour cette première consultation, il est beaucoup plus difficile de lui adresser les parents ensuite. De plus, aucun parent n'a jamais refusé cette première consultation à deux.
Cela étant, les parents se tournent d'abord vers la pédiatre et c'est elle qui donne le fil conducteur de la consultation, en présentant le centre, puis en les interrogeant et en pratiquant un examen médical très complet de l'enfant ( « organe par organe »). Les interventions du psychologue ne sont pas programmées, elles varient en fonction de la situation.
Le regard et la parole.
Médecin et psychologue « ne sont pas attentifs aux mêmes choses », la première étant plus tournée vers « le corps ». Pour Frank Charpine, le travail du médecin se fonde sur le regard et s'élabore en suivant un modèle déductif (sémiologie, diagnostic, traitement), celui du psychologue part de la parole et utilise un modèle inductif, fondé sur l'empathie. En outre, ils forment un couple face à un autre couple. Le danger serait de s'imaginer qu'ainsi, une démarche de « globalité de soins » est possible. Cette « vision rédemptrice » cache en fait « une volonté de maîtrise de la souffrance ».
L'expérience apprend à travailler plus modestement. Le but de la consultation conjointe devient alors de permettre aux parents de surmonter le traumatisme engendré par la réalité de la maladie, qui bouleverse leurs attentes et remet fortement en question les histoires familiales : filiation et transmission n'ont en effet plus rien d'évident. Il faut d'abord soutenir ces parents et leur permettre de ne pas être « dépassé » par leur propre histoire, ce qui ne signifie pas introduire « de la psychologie » trop vite. Il s'agit de préparer un travail en commun des différents intervenants pour l'enfant et ses parents, dont la pédiatre reste le chef d'orchestre.
* Tél. 01.43.42.09.10, www.anecamsp.org.
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