C'EST UNE EQUIPE de l'école de médecine de Harvard qui vient d'identifier, chez le singe rhésus, cette protéine qui a la propriété de bloquer la réplication du virus VIH1 : la protéine TRIM5 alpha. Le mécanisme moléculaire grâce auquel cette protéine empêche le virus de se répliquer dans les cellules infectées reste à définir. La découverte de Stremlau et coll. pourrait néanmoins conduire au développement de nouvelles approches thérapeutiques visant à inhiber la multiplication du VIH1 dans les cellules humaines.
Au départ de ce travail, un phénomène qui intrigue depuis déjà plusieurs années : il existe visiblement chez certains primates non humains un système qui permet de bloquer le VIH1 immédiatement après son entrée dans les cellules : grâce à ce procédé moléculaire, le virus ne peut se répliquer, son cycle de reproduction s'arrête avant même que l'ARN soit rétrotranscrit en ADN.
Cherchant à identifier des gènes à l'origine de ce mécanisme, Stremlau et coll. ont eu recours à une banque de cellules humaines exprimant chacune un gène du génome du singe rhésus. Les auteurs ont recherché, parmi les cellules de la banque, celles qui résistaient à l'infection par le virus VIH1, mais qui étaient susceptibles à l'homologue simien du VIH (le VIS) ou au virus murin VLM : de telles cellules doivent exprimer un gène simien bloquant spécifiquement la multiplication du VIH1.
Cette stratégie a conduit les chercheurs à isoler le gène codant pour la protéine TRIM5 alpha.
Cellule humaine et protéine de singe.
Stremlau et coll. ont alors établi une lignée cellulaire humaine exprimant la protéine TRIM5 alpha du singe. L'étude de cette lignée leur a permis de vérifier que la protéine simienne suffisait à conférer une résistance à VIH1 aux cellules humaines : comme on s'y attendait, si le virus peut toujours pénétrer dans les cellules, l'expression de TRIM5 alpha bloque très rapidement le cycle viral. En revanche, TRIM5 alpha ne perturbe que très faiblement la réplication des virus VIS et VLM. Son activité antivirale est donc spécifiquement dirigée contre le virus humain VIH1.
Afin d'identifier la cible virale de TRIM5 alpha, les chercheurs ont ensuite infecté la lignée cellulaire humaine transgénique avec des virus chimères, combinant les patrimoines génétiques des virus VIH et SIV. Cette expérience a démontré que TRIM5 alpha exerçait son activité antivirale uniquement sur les virus exprimant les protéines de capside du virus humain VIH1. La cible de TRIM5 alpha est donc une protéine de capside.
Les chercheurs ont identifié l'homologue humain de TRIM5 alpha. Bien qu'exprimé au même niveau que la protéine du singe, la protéine humaine n'a aucune activité anti-VIH1.
Peu de choses sont connues au sujet de la famille des protéines TRIM. Leur structure indique qu'elles sont capables de fixer du zinc, de s'agréger en complexe et de fixer d'autres protéines. Il a été observé que la protéine TRIM5 forme des agrégats dans le cytoplasme des cellules, mais le mécanisme par lequel ces agrégats conduisent à l'inhibition de la multiplication du VIH1 est encore inconnu.
Plusieurs pistes à explorer.
Stremlau et coll. suggèrent cependant plusieurs pistes à explorer : les protéines TRIM pourraient interagir avec le virus de manière à le piéger au sein d'un agrégat protéique. Alternativement, elles pourraient induire la modification des protéines de capsides pour conduire à la destruction du virus.
Une fois que le mécanisme d'action de TRIM5 alpha aura été élucidé, il sera possible d'imaginer une solution pour recréer son effet dans les cellules humaines.
M. Stremlau et coll., « Nature » du 26 février 2004, pp. 848-853.
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