NOIR ET BLANC, contre-plongée. Une silhouette sombre s'élance dans le vide depuis un plongeoir de bois, après une course qu'on imagine effrénée. Sur le ciel lumineux, on distingue le vol d'un avion. Cette œuvre du photographe allemand Walter Fogel, symbole de liberté et de vie, s'intitule « Abflug », décollage. Elle a remporté le prix One Vision de la photographie européenne consacrée au sida, catégorie professionnels, remis la semaine dernière à Paris.
La compétition était organisée par les Laboratoires BMS (Bristol-Myers Squibb), engagés de longue date dans la lutte contre le sida, par des recherches thérapeutiques, mais aussi par la prévention, la formation et l'accès aux soins, en particulier en Afrique.
Lancé le 1er décembre 2003, à l'occasion de la Journée mondiale du sida, le concours invitait les personnes concernées par le virus à photographier leur propre vision de la maladie - en privilégiant l'espoir, la vie au jour le jour, les victoires quotidiennes, à l'heure des nouveaux traitements. Le jury rassemblait des personnalités européennes - photographes, journalistes, membres d'associations de patients - sous la présidence du photographe anglais Robert Taylor. Près de 550 personnes de 16 pays européens, en majorité des amateurs, ont participé à cette première édition.
Une meilleure qualité de vie.
Dans les photos primées (4 prix européens, 14 prix nationaux), la tonalité n'est jamais pathétique ni larmoyante. Le jury a récompensé des clichés donnant une vision positive de la vie des patients, toute en sobriété et en pudeur. On retiendra en particulier « la Vie », du Dr Andrea Bedini, deuxième prix amateur, qui fixe un instant de complicité entre un malade et son jeune enfant, au cours de vacances d'été : « Le titre, comme le message de la photo, explique le médecin italien, représentent l'amélioration de la qualité de vie des personnes vivant avec le virus, avec une référence toute particulière au désir d'être parent. »
Lors de la remise des prix, le président du jury a tenu à laisser la parole au lauréat britannique, Richard Sawdon-Smith, récompensé pour une image le mettant en scène en train de s'ausculter (« Listening to myself : Closed ») : « Cette photographie explore la notion d'identité. Suis-je défini par mon statut de séropositif ? Ou bien est-ce que je me définis moi-même en tant que personne ? » Une question qui renvoie au regard de toute la société.
Une initiative salutaire.
Avec l'édition d'un calendrier illustré des photographies primées, le concours permettra de soutenir financièrement plusieurs mouvements à travers l'Europe, en France l'association Aides. Pour son président Christian Saout, présent à la remise des prix, cette compétition est salutaire en un moment où l'on ne parle plus guère du sida dans nos sociétés : « L'initiative One Vision met l'accent sur la nécessité que le sida, présent dans nos vies, soit aussi présent par le regard. Il n'est pas possible de combattre quelque chose qui n'est pas identifié. » Le concours est aussi une occasion de nommer une exclusion vécue par beaucoup de malades, encore souvent stigmatisés.
Avec ces sourires, ces mouvements de vie, cette espérance captée dans les regards, on peut croire que le palmarès du concours One Vision contribuera à donner une autre image d'un fléau qui affecte entre 520 000 et 680 000 personnes en Europe, et 40 millions à travers le monde.
Les photos primées sont visibles sur le site : www.onevision2004.org.
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