DE NOTRE ENVOYEE SPECIALE
LES 500 DIRECTEURS d'établissements privés non commerciaux venus assister au congrès de la Fehap n'étaient pas seuls : à l'extérieur du palais des congrès du Futuroscope, plusieurs dizaines d'agents hospitaliers ont manifesté, banderoles à l'appui, pour dénoncer le gel de leurs salaires.
Un mouvement discret, mais surtout à ne pas sous-estimer, a commenté un chef d'établissement lors d'un débat avec Edouard Couty, le patron de la Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos) au ministère de la Santé : « La pression sociale dans nos établissements est très forte, les gens sont inquiets à propos du changement de mode de financement et à propos des 9 000 emplois créés au titre des 35 heures - comment seront-ils maintenus quand les aides de l'Etat auront disparu fin 2004 ? », a-t-il demandé.
Les médecins aussi ont souhaité alerter Edouard Couty sur leurs conditions de travail « inadmissibles ». Le Dr Jean-Pierre Genet a pris la parole pour dénoncer l'impossibilité d' « organiser le temps de travail des équipes médicales, tout particulièrement dans les disciplines à temps médical continu ». « Nous posons la même question depuis 18 mois : rien n'est fait pour permettre dans nos hôpitaux l'application de la directive européenne » (qui limite à 48 heures par semaine, gardes comprises, le temps de travail des médecins hospitaliers), a rappelé le président de la conférence des présidents de CME des hôpitaux privés.
Le secteur Psph (privé, participant au service public hospitalier) ne cesse d'interpeller les autorités sur son manque d'attractivité, en raison notamment des « différences extraordinaires de financement » des gardes avec le secteur public, selon le Dr Genet. Edouard Couty a annoncé la tenue prochaine d'une discussion avec la Fehap pour trouver un dispositif efficace permettant aux médecins des hôpitaux privés de respecter la directive européenne, mais à propos de leur rémunération, il a contourné le problème : « Les praticiens du public veulent votre statut pour plus de liberté, et vous, vous voulez leur salaire. J'ignore quel secteur est le mieux », a dit le directeur de l'Hospitalisation, appelant les praticiens à « plus de transparence ».
« Période à haut risque ».
Prenant à leur tour la parole, les responsables de la Fehap ont longuement détaillé leurs motifs d'insatisfaction : rénovation de la convention collective non financée en intégralité par l'Etat, non-prise en compte des déficits antérieurs, alors que les hôpitaux publics se voient accorder « le privilège » des reports de charge, dispositif de réduction du temps de travail financé différemment par rapport au secteur public... Avec cette liste, les directeurs d'établissements privés à but non lucratif ont autant de raisons d'être inquiets que leurs salariés.
« Nos établissements traversent une période à haut risque », a confirmé le président de la commission « soins de suite et de réadaptation » à la Fehap, Jacques Brisson. A propos d'Hôpital 2007, « le gouvernement a lancé un chantier très lourd, avec beaucoup d'ambitions », a-t-il dit, avant d'ajouter : « Nous voyons une opportunité stratégique de transversalité dans l'élaboration des Sros de troisième génération. En revanche, le passage à la tarification à l'activité (T2A) nous inquiète : nos établissements accueillent beaucoup de personnes âgées aux pathologies complexes. Or, il nous apparaît que la T2A favorise une prise en charge séquencée, standardisée, de nature à conduire à une sélection des malades. »
Edouard Couty a tenté de rassurer les troupes : « Les inégalités de traitement entre le secteur hospitalier public et privé à but non lucratif vont s'estomper progressivement avec la T2A. On entend beaucoup de critiques au sujet de cette réforme, mais je pense que ce serait une erreur de s'arrêter en cours de route. »
La Fehap repartira de son congrès avec de bien maigres garanties. Elle n'a pas réussi à obtenir l'avance de trésorerie qu'elle réclamait pour aider ses établissements sur le court terme. « Si on s'engage dans un nouveau système de financement, c'est complètement, sans mesures compensatoires, même transitoires, qui viendraient le modifier », a déclaré Edouard Couty.
« A défaut d'obtenir des réponses précises (aux questions posées) , les établissements de la Fehap ne peuvent que s'interroger sur la stratégie du ministère de la Santé et des ARH. Majoritaire et en développement en Europe, notre secteur est en danger en France », estime la Fédération, qui regroupe près de 2 750 établissements.
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