«CES RÉSULTATS nous aident à mieux comprendre comment les gènes altèrent la fonction cérébrale dans la psychose», observe dans un communiqué le Dr Jeremy Hall, psychiatre à l’université d’Edimbourg, qui a dirigé cette étude. «Nous espérons qu’une connaissance accrue dans ce domaine rendra possible le développement de nouveaux traitements dans le futur. »
La schizophrénie se manifeste par des symptômes psychotiques, notamment des idées délirantes et des hallucinations, qui commencent généralement entre 16 et 28 ans. Des déficits cognitifs précèdent la survenue du syndrome complet et ces déficits semblent rester stables pendant toute l’évolution de la maladie.
L’étiologie de la schizophrénie reste incertaine, mais des anomalies de structure et de fonction cérébrales sont constatées, en particulier dans les lobes frontaux et temporaux.
Il est maintenant admis que la schizophrénie a une forte composante génétique, qui est complexe ; plusieurs gènes combineraient leurs effets pour créer le phénotype pathologique. Il est donc difficile d’élucider la base génétique de la schizophrénie.
Dans plusieurs études du génome, il apparaît qu’une région du chromosome 8 (8p22-p11) possède un des liens les plus robustes avec la schizophrénie. Dans cette région, le gène NRG1, codant pour la neuréguline 1, est un candidat prometteur pour un gène de susceptibilité. Il intervient en effet dans le neurodéveloppement, dans la régulation de l’expression des récepteurs pour le glutamate et d’autres neurotransmetteurs, ainsi que dans la plasticité synaptique.
Toutefois, jusqu’à présent, aucune mutation fonctionnelle du gène n’a été impliquée dans la schizophrénie. Ce qui a conduit à suggérer que les polymorphismes du gène liés à la schizophrénie pourraient exercer un effet en modifiant son expression.
Un variant (SNP) à risque dans le promoteur du gène NRG1 a été associé récemment à une expression accrue d’une isoforme (de type IV) de la neuréguline 1.
Il restait à savoir si de tels changements d’expression de NRG1 pouvaient entraîner la fonction cérébrale anormale et les symptômes psychotiques observés dans la schizophrénie.
IRM fonctionnelle.
Hall et coll. ont examiné cette question dans un groupe de jeunes gens à haut risque génétique de faire une schizophrénie, car leur famille comportait au moins deux membres affectés. Ces jeunes gens ont été suivis pendant dix ans (de 16 à 25 ans) dans le cadre de la Edinburgh High Risk Study.
Les chercheurs ont pu étudier l’ADN de 79 sujets à haut risque. Ils ont étudié la relation entre le génotype (C/C, C/T, ou T/T) du variant (SNP8NRG243177) et l’activation cérébrale mesurée par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf).
Ils ont ainsi constaté que les sujets portant le génotype à risque (T/T) montrent une activation diminuée des régions frontales et temporales.
Ils ont observé que tous les sujets de génotype T/T développaient des symptômes psychotiques.
Enfin, il apparaît que les sujets T/T présentent un QI plus faible que ceux des groupes C/T ou C/C.
Développement des symptômes.
«Nous montrons donc qu’un variant spécifique dans la région du promoteur du gène NRG1 est associé à une activation réduite du lobe frontal et temporal, au développement des symptômes psychotiques et aux déficits de la fonction cognitive, notent les chercheurs. Ces résultats démontrent que des variants génétiques affectant l’expression génique peuvent contribuer à la pathogenèse de la schizophrénie.»
«Bien que le variant ait prédit un développement des symptômes psychotiques avec 100% de chances dans notre cohorte, il est très peu probable que ce soit le cas dans la population générale», souligne le Dr Hall, pour « le Quotidien ». «En effet, les sujets de notre étude étaient à haut risque génétique. Il convient probablement de retenir que le variant génétique majore le risque d’un facteur d’environ 2,5.»
Les chercheurs souhaitent maintenant savoir comment cette variation affecte la fonction cérébrale de façon à entraîner les symptômes psychotiques.
Ils tiennent à souligner la collaboration prolongée des familles sans lesquelles cette recherche n’aurait pu être possible.
Hall et coll. « Nature Neuroscience », DOI : 10.1038/nn1795.
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