EN FRANCE, on estime que 15 % des enfants sont en surpoids, que 3 % sont considérés comme obèses. On se réfère à la définition internationale de l'Ioft (International Obesity Task Force). En Europe, 31,8 % sont en surpoids et 7,9 % obèses. Cet excès de poids apparaît très tôt chez les enfants de 5 à 6 ans. Il traduit l'impact précoce de facteurs favorisant le surpoids. Prévenir cette obésité infantile qui, pour une forte majorité d'enfants, se transformera en obésité à l'âge adulte est devenu un enjeu capital pour les décennies à venir.
Parmi les facteurs de risque de l'obésité bien identifiés (prédisposition génétique, activité physique insuffisante, habitudes alimentaires), des facteurs nutritionnels dans les premiers mois de la vie, voire in utero, peuvent moduler le risque de voir s'installer un surpoids ou une obésité, selon un mécanisme d'empreinte métabolique.
Comparer lait maternel et laits infantiles.
Dans les années 1990, des données épidémiologiques suggéraient que les enfants obèses et en surpoids avaient consommé, au cours de leur première année de vie, davantage de protéines que les non-obèses. L'étude EU Childhood Obesity Programme a pour objectif de vérifier cette hypothèse, en comparant l'influence du lait maternel et des laits infantiles à différentes teneurs en protéines sur l'évolution du poids des enfants. Il s'agit d'une étude interventionnelle, financée à 80 % par l'Union européenne, commencée en 2002, et qui se poursuit au sein du 6e programme Earnest. Près de 1 000 nourrissons de cinq pays européens ont été inclus et seront suivis jusqu'à l'âge de 8 ans, sur les plans métabolique et anthropométrique.
Les résultats intermédiaires portent sur les 990 nourrissons inclus, après une phase d'intervention de 12 mois et un suivi jusqu'à l'âge de 2 ans. Trois cent cinq nourrissons nourris au sein constituent le groupe contrôle. Les autres nourrissons ont été répartis en deux groupes de façon randomisée : 335 ont été nourris avec un lait à faible teneur en protéines (1,8 g/100 kcal, puis 2,25 g/100 kcal) et 350 avec un lait à teneur plus élevée en protéines (3 g/100 kcal, puis 4,5 g/100 kcal). Tous ces laits étaient conformes aux normes européennes en vigueur.
Des IMC plus importants à 12 et 24 mois.
Des premiers résultats (non encore publiés), il ressort des différences significatives entre les deux groupes nourris aux laits infantiles. Ceux qui sont nourris avec le lait à teneur élevée en protéines présentent des IMC significativement plus élevés à 12 et 24 mois que les enfants nourris avec le lait à faible teneur en protéines. Ces derniers, par rapport aux enfants nourris au sein, présentent des schémas de croissance identiques jusqu'à 24 mois (les IMC ne sont pas significativement différents). Précisons qu'aucun effet adverse n'a été signalé dans les groupes nourris aux laits infantiles.
A partir de ces premiers résultats, quelques hypothèses sont avancées sur les mécanismes qui ont entraîné les différences observées à 24 mois. Un apport en protéines supérieur aux besoins métaboliques augmenterait la sécrétion d'insuline et d'IGF-I (Insuline Growth Factor I), un facteur favorisant la multiplication des adipocytes. En effet, les enfants du groupe lait à teneur plus élevée en protéines présentent une concentration plasmatique d'IGF-I plus importante que ceux nourris avec du lait à teneur moindre en protéines ainsi qu'une concentration plasmatique moindre d'IGF-BP2 (insulin growth factor binding protein 2) plus faible. D'autre part, l'excrétion dans les urines du peptide C, liée à la concentration de la créatinine urinaire, tend à être plus élevée chez les enfants de 3 mois du groupe lait à teneur en protéines plus élevée que dans les autres groupes. A six mois, cette différence est encore plus significative ; elle témoigne également d'un niveau de sécrétion d'insuline plus élevé.
On constate que, à 3 mois, les enfants du groupe lait à teneur en protéines élevée présentent une osmolarité urinaire significativement plus élevée que dans les autres groupes, ce qui reflète une concentration molaire rénale plus élevée, associée à un apport protéique plus important, alors que la capacité de concentration urinaire est encore limitée chez les nourrissons.
Ces résultats intermédiaires suggèrent que l'allaitement maternel réduirait le risque d'obésité infantile, mais n'autorisent pas à dresser des conclusions définitives sur un lien entre apport élevé de protéines pendant les tout premiers mois et un risque d'obésité ultérieur. Seul le suivi jusqu'à l'âge de 8 ans de ces enfants, avec un calcul régulier de l'IMC et du tracé de la courbe de corpulence, permettra d'aboutir à des conclusions fiables et de repérer notamment le «rebond d'adiposité», qui, s'il est précoce (avant 6 ans) est un indice de risque d'obésité infantile.
* Budapest (Hongrie), d'après une conférence organisée par l'institut Danone à l'occasion du 15e Congrès européen sur l'obésité dans le cadre des rencontres Earnest (Early Nutrition Programming Project) avec, parmi les intervenants, le Pr Denes Molnar (pédiatre, Hongrie), le Dr Monique Raats (Royaume-Uni).
L'institut Danone partenaire de l'étude
L'institut Danone est partenaire de l'étude européenne EU Childhood Obesity Program. Cette participation s'inscrit dans ses missions. Il rassemble des scientifiques, des chercheurs, des médecins et des personnalités reconnues dans le domaine de l'alimentation.
Blédina, leader de l'alimentation infantile en France, avec 50 % de parts de marché, est également partenaire industriel de l'étude. Blédina, pour l'occasion, a élaboré des formules expérimentales et une logistique complexe pour répondre à tous les critères demandés.
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