En cas de Fibrillation atriale (FA) persistante, les symptômes de mauvaise tolérance incitent à réaliser une cardioversion (souvent électrique, parfois médicamenteuse) pour obtenir le retour au rythme sinusal. Sans une anticoagulation efficace, le risque de complication thromboembolique dans les suites immédiates d’une cardioversion élective est estimé entre 5 et 7 %. Ce risque est ramené à 1 % avec un traitement anticoagulant bien conduit. L’utilisation d’AVK est habituelle pour prévenir ce type de complication. Pour les Anticoagulants oraux directs (AOD initialement baptisés NACO), nous disposions seulement d’analyses effectuées a posteriori à partir d’essais thérapeutiques contrôlés. Ces analyses étaient en faveur de leur utilisation dans cette situation, en particulier avec le dabigatran. L’efficacité et la sécurité d’emploi du rivaroxaban, versus un AVK à posologie ajustée, ont donc été évaluées pour les cardioversions électives réalisées chez des patients avec une FA non valvulaire chez lesquels la restauration du rythme sinusal paraissait préférable.
Dans X-VERT, essai multicentrique randomisé conduit en ouvert en groupes parallèles contre traitement actif, les critères d’inclusion étaient les suivants : patients en FA non valvulaire, dont l’arythmie était présente depuis plus de 48 heures ou de durée inconnue, et chez qui était décidée une cardioversion. Ils ont été randomisés en 2:1 entre le rivaroxaban et un AVK. Les différents scénarios rencontrés en pratique clinique étaient possibles. En effet, cette cardioversion pouvait être précoce dans les premiers 5 jours après contrôle de l’absence de thrombus de l’auricule gauche par une échocardiographie transœsophagienne (58 % des cas), soit retardée après au moins 3 semaines d’une anticoagulation efficace (42 % des cas). La posologie du rivaroxaban était de 20 mg en une prise quotidienne (ou 15 mg si la clairance rénale était entre 30 et 49 ml/min). Celle des AVK était ajustée pour obtenir un INR cible compris entre 2 et 3. Il y avait aussi la possibilité d’avoir des relais d’un type d’anticoagulant à un autre à la randomisation avant la cardioversion.
L’étude a inclus 1 504 patients. Il s’agissait d’une analyse randomisée simplement descriptive et non réellement d’une étude de non-infériorité car l’effectif nécessaire pour une étude statistiquement efficace aurait été supérieur à 25 000 patients et donc irréalisable en pratique.
Dans cette première étude prospective et dédiée d’un AOD dans la cardioversion de la FA l’incidence des événements du critère primaire d’efficacité (risque d’accident vasculaire cérébral, accident ischémique transitoire, embolie périphérique, infarctus du myocarde ou décès cardiovasculaire) a été basse et similaire à celle observée avec les AVK avec un suivi jusqu’à 42 jours après la cardioversion : 0,51 % dans le groupe rivaroxaban et 1,02 % dans le groupe AVK, la différence n’étant pas statistiquement significative (RR : 0,50 ; IC95 : 0,15-1,73).
De même, l’incidence des saignements majeurs a été équivalente dans les deux bras, respectivement de 0,61 % et 0,8 % (RR : 0,76 ; IC95 : 0,21-2,67). Si le délai de réalisation de la cardioversion a été similaire pour la stratégie précoce sous rivaroxaban ou sous AVK, on retiendra que ce délai a été significativement plus court chez les patients sous rivaroxaban que chez ceux recevant des AVK en cas de stratégie retardée qui reste très fréquente en pratique clinique (médiane de 22 jours versus 30 jours ; p ‹ 0,001).
Le présentateur de l’étude, Riccardo Cappato de Milan, a donc insisté sur cet avantage potentiel à utiliser l’anticoagulant direct. Alors qu’avec un AVK, il faut attendre au moins trois semaines après que le niveau d’anticoagulation soit stabilisé pour faire la cardioversion, le délai d’attente pourrait être réduit avec le rivaroxaban ne nécessitant pas d’adaptation de la dose. Le bénéfice est ainsi « logistique », en évitant de différer certaines cardioversions (avec souvent des reports de dernière minute ou des annulations d’hospitalisation à l’admission) pour les malades qui ont un retard à la stabilisation de l’INR entre 2 et 3. L’étude semble aussi répondre de manière pragmatique et favorable aux inquiétudes pour les patients de plus en plus nombreux qui sont déjà sous AOD : certains proposaient alors de reprendre transitoirement un traitement par AVK afin de limiter les risques médicolégaux pour les rares cas d’accidents thromboemboliques lors du retour au rythme sinusal. Voilà des éléments indicatifs plutôt rassurants.
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