Une alarmante étude chez le mouton

Le risque transfusionnel des maladies à prions ne doit pas être négligé

Publié le 01/09/2008
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LE RISQUE DE transmission des maladies à prions par la transfusion sanguine serait bien plus important qu'on l'imaginait. C'est en tout cas ce que suggère une étude conduite dans le modèle expérimental du mouton. Les travaux de Nora Hunter et coll., de l'université d'Édimbourg, indiquent en effet que 36 % des animaux recevant le sang de moutons expérimentalement infectés par le prion de l'encéphalite spongiforme bovine (ESB) développent la maladie. Lorsque le prion des animaux donneurs est celui associé à la tremblante, le risque de transmission de la maladie s'élève même à 43 %.

L'existence d'un risque transfusionnel associé à l'épidémie d'encéphalite spongiforme transmissible est connue depuis plusieurs années, mais le faible nombre de cas humains diagnostiqués (voir encadré) laissait espérer que ce risque était faible. Les résultats de l'étude écossaise laissent entendre que ce n'est probablement pas le cas.

Des mesures prises depuis des années.

Des mesures visant à prévenir ce risque sont prises depuis plusieurs années : aucun test ne permettant actuellement de détecter les lots de sang contaminé par un prion, les produits sanguins destinés à la transfusion sont déleucocytés. Cette technique est coûteuse et ne réduirait que de 42 à 72 % l'infectivité d'un sérum contaminé (l'efficacité de cette méthode de décontamination n'a été évaluée que dans le modèle du hamster). Les travaux de Hunter et de son équipe suggèrent qu'il ne faut pour autant en aucun cas se dispenser de cette précaution.

Les chercheurs écossais ont travaillé dans le modèle du mouton car la corpulence de l'animal permet de pratiquer des transfusions en utilisant des volumes de sang proches de ceux utilisés lors de la transfusion d'un patient humain. Des expériences avaient déjà été conduites chez la souris, mais le faible volume des transfusions rendait les résultats difficilement transposables aux cas humains.

Hunter et coll. ont utilisé le sang de moutons contaminés depuis plus ou moins longtemps, déjà malades ou encore au stade asymptomatique de l'encéphalite spongiforme.

Parmi les 22 animaux qui ont reçu le sang de moutons expérimentalement infectés par le prion de l'ESB, 5 ont développé la maladie. Les chercheurs ont montré que 3 autres animaux asymptomatiques neuf ans après la transfusion étaient également porteurs du prion pathogène de l'ESB. Quant aux 21 moutons transfusés avec le sang d'animaux naturellement infectés par le prion de la tremblante, 9 ont fini par développer la maladie.

La durée de l'incubation du donneur.

L'étude écossaise montre, en outre, que le risque de transmission transfusionnelle des prions est augmenté avec la durée d'incubation de la maladie du donneur. Certaines variations génétiques caractérisant le gène PrP des moutons receveurs influencent également le risque d'infection par le sang contaminé.

F. Houston et coll., « Blood », édition en ligne avancée.

Quatre cas humains déjà recensés

Les autorités de santé britanniques ont identifié 66 personnes ayant reçu des produits sanguins de donneurs qui ont déclaré un nvMCJ (nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob) après leur don. Sur soixante-six personnes à risque, trente-quatre sont décédées moins de cinq ans après leur exposition au nouveau variant du prion et huit autres sont mortes après un laps de temps suffisant pour que la maladie ait pu devenir symptomatique. Une contamination par l'agent infectieux non conventionnel a pu être mise en évidence chez trois d'entre elles. Une quatrième personne, toujours vivante, aurait également été contaminée.

Ces quatre patients ont reçu du sang non déleucocyté, entre 1996 et 1999.

www.eurosurveillance.org

> ELODIE BIET

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8409