LE LABORATOIRE Pfizer et la Fédération française de cardiologie (FFC) ont fait naître cette année un observatoire destiné à étudier l'attitude des « Français face au risque cardio-vasculaire ». Cette création se concrétise par la publication d'une étude « omnibus » réalisée par TNS Healthcare, à partir d'une enquête téléphonique annuelle auprès d'un panel représentatif de 2 000 personnes.
Enquête sans surprise.
Les résultats de cette première année montrent qu'une bonne part des personnes interrogées associe le risque cardio-vasculaire à l'infarctus du myocarde (48 %). Seules 10 % d'entre elles pensent à l'accident vasculaire cérébral (pourcentage qui a peut-être évolué ces derniers jours, du fait de l'actualité...). Sans grande surprise, les personnes interrogées identifient bien les facteurs de risques liés à la vie courante (tabagisme, sédentarité...) et beaucoup moins les facteurs de risque médicaux (HTA, diabète) ou ceux sur lesquels ils n'ont pas de prise, comme l'âge, cité spontanément par seulement 4 % des sondés. De même, les personnes interrogées identifient mal leur propre niveau de risque, 28 % déclarant se situer à 5 sur une échelle de risque allant de 0 à 10 - signe d'une incapacité à répondre, selon Yves Morvan, de TNS Healthcare.
Les promoteurs de l'étude estiment que les Français ont une mauvaise perception de leur risque cardio-vasculaire réel et que, s'ils ont bien intégré les messages de santé publique (le Programme national nutrition santé et les campagnes anti-tabac sont passées par là), ils ne les mettent pas en application à titre individuel. Ainsi, de nombreux sondés sont conscients de l'importance de faire de l'exercice physique (35 %). Ceux qui ont au moins un facteur de risque en ont parlé à 43 % avec leur médecin, mais la moitié seulement a modifié son comportement dans ce sens.
Risque choisi ou ignoré.
Selon les présentateurs de l'étude - le Pr Claude Lefeuvre, de la FFC, les représentants de Pfizer et le Pr Denis Pouchain, médecin généraliste -, les patients tout comme de nombreux médecins de ville n'auraient pas assez conscience du « risque vasculaire global », c'est-à-dire la combinaison de facteurs conduisant à une probabilité significative de survenue d'un accident cardio-vasculaire dans les dix ans. Le Pr Pouchain attribue cette lacune au « morcellement de l'enseignement de la médecine » et du discours médical, ainsi qu'à la relative jeunesse du concept de risque global. Il conseille à ses confrères d'utiliser les outils disponibles (tables de Sheffield, sites Internet d'estimation du risque pathologique...) dès lors que se présente un patient âgé de plus de 45 ans.
L'enquête montre également qu'une fraction (8 %) des sondés est parfaitement consciente de son niveau de risque, mais ne compte pas modifier pour autant son comportement. « Même en prévention secondaire, après un accident cardiaque, on voit des patients qui se remettent à fumer », affirme le Pr Lefeuvre, qui a « bien compris que les messages négatifs ne passent pas ». La FFC compte utiliser les résultats de cette étude pour ajuster ses campagnes de prévention.
Invité à commenter les résultats du tout nouvel observatoire, le sociologue Gérard Mermet a souligné la faible corrélation entre les risques réels et les pratiques de prévention. Selon lui, les patients ont besoin de conseils de proximité et non de campagnes institutionnelles qui ne prennent pas en compte leur individualité. Parallèlement, le sociologue a évoqué les limites de la prévention en parlant de « quête sécuritaire de notre société », voire d'une « véritable phobie du risque » et d'une « utopie du risque zéro ». Il a décrit notre société comme fortement anxiogène. Il a ainsi fait émerger une question relative à la communication préventive en santé publique : le discours de prévention est essentiel, mais à partir de quand risque-t-il à son tour de devenir pathogène ?
Le poids des MCV
Les maladies cardio-vasculaires sont responsables d'environ 180 000 décès par an. Chaque année, on enregistre 120 000 infarctus du myocarde et 130 000 AVC, dont un quart sont mortels et la moitié provoquent des séquelles.
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