DEUX CHERCHEURS britanniques présentent dans le « Lancet » de cette semaine les résultats d'une étude sur l'effet des examens diagnostiques utilisant les rayons X sur le risque de cancer. D'après leurs calculs, 0,6 % des cancers diagnostiqués chaque année au Royaume-Uni seraient attribuables à une exposition médicale aux rayons X. Aux Etats-Unis et dans douze autres pays développés, ce pourcentage oscille entre 0,6 et 1,8 %. Au Japon, la proportion des cancers qui semblent être induits par une irradiation liée aux pratiques médicales est plus importante que dans le reste des pays étudiés : elle atteint 3 %.
L'utilisation des rayons X à des fins diagnostiques constitue la plus importante source d'irradiation dans la population générale. Le fait que ce mode d'irradiation exerce des effets délétères sur la santé humaine est généralement accepté. Cependant, les risques ont rarement été quantifiés et très peu de données concernant l'effet de faibles doses de rayonnement sur les organismes vivants sont disponibles. C'est précisément dans le but de combler cette lacune que Berrington de Gonzales et Darby (université d'Oxford) ont décidé de mener leur étude.
Des extrapolations.
Les auteurs ont dû faire face à un problème majeur : il était impossible d'évaluer le risque de cancer induit par les rayons X selon une méthode d'épidémiologie classique. L'estimation de ce risque passe nécessairement par des extrapolations. Dans la conclusion de leur article, Berrington de Gonzales et Darby précisent d'ailleurs qu'il existe une incertitude quant à l'exactitude de leurs résultats : leurs calculs reposent en effet sur de nombreuses hypothèses. En conséquence, il est possible que les chiffres avancés dans cette étude soient surestimés.
En revanche, les deux chercheurs ne pensent pas que leurs hypothèses puissent avoir entraîné une sous-estimation du risque de cancers induits par des rayons X délivrés dans le cadre d'un diagnostic.
Quoi qu'il en soit, cette étude est la plus fiable de toutes celles du même type qui ont été menées jusqu'ici. Elle se fonde sur l'utilisation d'un modèle élaboré à partir des données concernant les Japonais qui ont survécu à la bombe atomique. Berrington de Gonzales et Darby ont utilisé ce modèle pour établir une relation entre l'incidence des cancers et la fréquence des expositions médicales aux rayons X dans quinze pays développés (Royaume-Uni, Australie, Canada, Croatie, République tchèque, Finlande, Allemagne, Japon, Koweït, Hollande, Norvège, Pologne, Suède, Suisse, Etats-Unis).
La nature des organes irradiés.
Au cours de leur analyse, les deux chercheurs britanniques ont tenu compte de l'âge et du sexe des patients ainsi que du type de cancer diagnostiqué. Ils ont également prêté attention aux types d'irradiation et aux doses de rayon délivrés en fonction des examens pratiqués. Enfin, la nature des organes irradiés (et donc leur radiosensibilité) a elle aussi été prise en compte pour le calcul du risque global de cancer induit par les rayons X.
Dans un commentaire accompagnant cet article, Herzog et Rieger (université de Munich) soulignent que, bien que les rayons X utilisés pour le diagnostic soient certainement à l'origine de cancers, cette pratique conduit également au dépistage précoce de nombreuses tumeurs : la proportion de patients soignés grâce à un diagnostic précoce est certainement plus importante que celle des sujets rendus malades par un examen diagnostique.
« The Lancet » du 31 janvier 2004, pp. 345-351.
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