SÉBASTIEN THIÉRY est un insolent. Il ne respecte rien, ainsi que l’ont démontré ses pièces précédentes (« Sans ascenseur », « Dieu habite Düsseldorf »), la série composée pour Canal Plus (« Chez Maman », avec Françoise Christophe), ou les sketches en caméra cachée qu’il adore concocter. Sébastien Thiéry ne se soucie en rien de vraisemblable, ni de psychologie. Et pourtant, au cur des situations les plus abracadabrantes, le sentiment saisit souvent les personnages. Source d’un rire décuplé. C’est le cas dans « Cochons d’Inde ».
L’action se situe dans une agence bancaire des plus familières. On est à Paris, de nos jours. Un guichetier (Sébastien Thiéry en chemise de jeune homme bien sage), un client (Patrick Chesnais), la directrice de l’agence (Josiane Stoléru), la mère du client (Anna Gaylor), le nouveau patron de la banque (Partha Pratim Majumder). Tout commence le plus simplement du monde. Le client est là pour retirer de l’argent, mais il va être retenu, et, disons-le, séquestré, accusé, dépouillé… Qui est le deus ex machina de ce cauchemar ? Chut ! On ne vous révélera pas la fin… Thiéry ne se soucie même pas de la logique interne de sa pièce… Il cultive l’absurdité. Il en rajoute.
Il n’est pas politique, mais il touche au politique. À la société, à l’argent, à la dépendance, aux relations de travail, à la servitude volontaire, au masochisme, à la frustration, sexuelle, sentimentale, à la solitude. C’est fou, féroce, terrible.
La pièce tiendrait-elle sans un metteur en scène très fort et des comédiens superbes ? Non sans doute. Mais voilà, Anne Bourgeois dirige une bande ultra-talentueuse dans un décor très efficace de Stéphanie Jarre. Comme Thiéry ne recule devant rien, il y a une scène qui pourrait être dérangeante tant elle est volontairement de mauvais goût : la crise érotique de la directrice… Mais c’est tellement intelligemment mis en scène et joué que c’est simplement terrible et drôle…
Ne racontons pas tout. Louons les interprètes. Anna Gaylor, une cliente sous perruque, puis la maman : elle est épatante. Partha Pratim Majumder, qui arrive à la fin, est drôle et malicieux. Josiane Stoléru, dont la finesse fait merveille dans le rôle d’une femme rigide et paumée, Brigitte, est remarquable. L’essentiel se joue entre le client et le guichetier. D`un côté un marchand de biens, pressé, ne prenant jamais le temps de souffler, voire de penser, et qui bascule dans un horrible cauchemar. C’est le très grand Patrick Chesnais. De l’autre, le guichetier que tout terrorise mais qui est capable de veulerie et de folie. C’est Sébastien Thiéry. Ces deux-là ont des mimiques, des regards, des gestes, des postures, une manière d’habiter les personnages qui est fascinante.
Une comédie ! Une véritable comédie ! Courez-y !
Théâtre Hébertot, à 21 heures du mardi au samedi et en matinée le samedi à 18 heures, le dimanche à 16 heures Durée : 1 h 30 sans entracte (01.43.87.23.23). Texte-programme publié par l’Avant-scène théâtre, n° 1254 (12 euros).
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