Maintenant que les outils – pompes, capteurs, et leur association via un téléphone portable – sont disponibles, comment arriver à la cellule bêta artificielle ? C’est-à-dire, si l’on met à part l’implantation de cellules naturelles, au système qui maintiendrait le patient diabétique de type 1 dans une glycémie normale – comprise entre 70 et 110 mg/dl la plupart du temps, sans dépasser 140 mg/dl après les repas (1).
L’approche dite « étape par étape », prônée par la Juvenile Diabetetes Research Foundation (JDRF) et soutenue par la FDA, démarre avec l’arrêt de la pompe en cas d’hypoglycémie, suivie par la baisse du débit en cas de prédiction d’hypoglycémie, puis par la gestion progressive des hyperglycémies, puis la gestion automatique, à l’exception des repas, puis totalement automatique. Une étape ultime pourrait être une double délivrance, d’insuline et de glucagon.
À côté de cette approche, une autre stratégie pourrait rechercher à atteindre d’emblée cet automatisme total, avec délivrance à la demande de glucagon : cet outil final est appelé pancréas bionique. Mais la quantité de matériel nécessaire à porter au quotidien est actuellement rédhibitoire. En fait, possible, mais inconfortable : il faudrait deux pompes, une pour l’insuline, une pour le glucagon et, ce dernier n’étant pas stable, le réservoir devrait être changé tous les jours.
Le système totalement implantable a été abandonné à cause de la courte durée de vie du capteur positionné à proximité du cœur. L’usage des pompes implantables est de toute façon difficile à généraliser.
La logique veut donc que l’on essaye d’accélérer le processus étape par étape. Ceci suppose tout d’abord de chercher à éviter les hypoglycémies, puis de viser un objectif initial de glycémies correctes, mais pas forcément normales – par exemple comprises entre 70 et 200 mg/dl – en espérant que l’objectif pourra être ajusté par la suite. C’est la stratégie actuellement adoptée. Le problème est que la voie sous-cutanée, pour l’instant utilisée, entraîne des délais, à la fois dans la mesure de la glycémie et dans l’absorption de l’insuline.
Déjà une perte de chance
Néanmoins, la recherche progresse, en Europe et aux États-Unis, avec plusieurs groupes impliqués. À Cambridge, il a été montré que la nuit, le temps passé en hypoglycémie pouvait être largement diminué par la boucle fermée, en augmentant le temps passé dans l’objectif. La faisabilité en dehors de l’hôpital a également été montrée. Donc le contrôle par boucle fermée nocturne est actuellement possible et cela a largement été montré et récemment publié (2) avec des études de 3 à 4 semaines. Pour Éric Renard, l’absence de boucle fermée nocturne chez un sujet DT1 équivaut pratiquement à une perte de chance actuellement compte tenu de ce que l’on sait.
L’épine des repas
Le problème est le contrôle des repas ; avec pics hyperglycémiques suivis d’hypoglycémies dues au fait que le système essaie de combattre l’hyperglycémie. Une des solutions consiste à annoncer le repas au système en renseignant la quantité de glucides qui va être ingérée. La seconde possibilité est de combiner les algorithmes avec d’autres, de sécurité, cherchant à éviter les hypoglycémies : ces algorithmes modulaires améliorent nettement les choses en augmentant le temps en normoglycémie. Les études en ambulatoire ont démarré à Padoue et à Montpellier ; elles sont très encourageantes (3). Ces systèmes sont non seulement portables mais acceptables : les patients portent une pompe, un capteur et un téléphone portable. En cas d’oubli ou de perte du téléphone, la pompe repasse automatiquement en mode normal, avec la programmation habituelle. À tout moment, le patient est informé de ce que fait le système : voyant orange si le système agit pour éviter une hyper/une hypo, rouge si le patient doit agir, vert sinon.
D’après la communication d’Éric Renard (Montpellier).
(1) Polonsky KS et al. N Engl J Med 1988;318 :1231-9
(2) Diabetes Care 2014 ; 37 : 1204-11 & 1789-96
(3) Del Favero et al, Diabetes Care 2014 ; 37 :1212-5 & 1789-96
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