Le retour du plan Johanet ?

Gilles Johanet doit aujourd'hui arborer un certain sourire. Une bonne partie des économies sur le médicament annoncées par Jean-François Mattei rappelle à n'en pas douter le fameux plan stratégique présenté par l'ancien directeur de la CNAM en 1999. Qu'on en juge.

La mise en place place de forfaits remboursements, qui consiste à instituer un seul tarif de remboursement quel soit le prix du médicament, mesure annoncée par le ministre de la Santé, rappelle sans aucun doute la proposition de Gilles Johanet d'instituer un tarif de remboursement par classe thérapeutique. L'ancien directeur de la Caisse nationale allait certes un peu plus loin que la proposition du ministre, puisqu'il voulait, après les génériques, étendre progressivement le principe à l'ensemble des médicaments. Mais l'idée était bel et bien la même puisqu'il s'agissait de déconnecter le prix du fabricant de celui du remboursement, et de permettre une concurrence entre laboratoires afin d'inciter fortement les fabricants des produits princeps à baisser leur prix au tarif des génériques. De cette manière, les médecins et leurs patients ne choisissent pas systématiquement le princeps. « Dans sa logique d'acheteur avisé, écrivait Gilles Johanet , la CNAM propose de prendre en charge les médicaments sur la base d'un forfait commun à plusieurs médicaments comparables. » Le choix que Jean-François Mattei semble faire aujourd'hui.
Autre proposition du ministre de la Santé qui peut rappeler celle du plan Johanet : la remise en cause du remboursement pour les classes thérapeutiques à faible amélioration du service médical rendu. M. Mattei propose de dérembourser en trois ans les spécialités pharmaceutiques, dont la commission de la Transparence (qui avait été chargée par Martine Aubry de passer en revue l'ensemble de la pharmacopée)a jugé l'efficacité douteuse. Que dit sur ce point le plan Johanet ? « La commission de la Transparence, explique-t-il , (...) s'est interrogée à plusieurs reprises sur la réévaluation de la prise en charge de certaines classes ou plus fondamentalement sur le bien-fondé de leur prise en charge. » Et au paragraphe suivant, on lit que « la logique même du service médical rendu conduit à redéployer les ressources de l'assurance-maladie en mettant fin à ces prises en charge au profit d'un meilleur remboursement des soins, dont l'efficacité est démontrée ». Un raisonnement que ne renierait pas Jean-François Mattei.
Si l'on ajoute que le plan Johanet s'était également prononcé pour la prescription en DCI, mesure présentée quelques mois plus tard par Elisabeth Guigou, lors du vote du PLFSS 2001, et reprise depuis par l'accord CNAM-généralistes du 5 juin dernier, on se dit que le plan stratégique de la CNAM a connu, au moins dans le domaine du médicament, un succès que son auteur n'escomptait guère, tant les critiques avaient été nombreuses à l'époque.