« C'EST SANS DOUTE la nomination la plus importante depuis l'arrivée de Nicolas Sarkozy; elle est beaucoup plus digne d'intérêt que celle de la plupart des ministres.» Ces propos d'un syndicaliste témoignent évidemment du rôle essentiel que joue et que va jouer Raymond Soubie dans les relations sociales au cours des prochaines semaines et des prochains mois.
Le président Nicolas Sarkozy, en l'appelant auprès de lui en tant que conseiller social, adresse en même temps un signal fort aux syndicats de salariés, alors que vont s'ouvrir des chantiers primordiaux sur le temps de travail, la réforme des régimes spéciaux de retraite ou le contrat unique.
Homme de dialogue et de concertation, il devrait aider le président de la République, le Premier ministre, dont on le sait très proche, ainsi que le ministre du Travail, Xavier Bertrand, dans les négociations qui s'annoncent difficiles et délicates avec les partenaires sociaux.
Conseiller social de Jacques Chirac puis de Raymond Barre lors de leur passage à Matignon, Raymond Soubie a également beaucoup travaillé, le plus souvent dans l'ombre, à la réforme des retraites de 2003 élaborée par François Fillon, et l'on dit qu'il n'est sans doute pas étranger au rapprochement dans le dialogue entre le ministre des Affaires sociales de l'époque, aujourd'hui Premier ministre, et la Cfdt, pour aboutir à l'accord que l'on sait.
Du côté des médecins, Raymond Soubie n'est pas non plus un inconnu. Loin de là. Tous n'en gardent pas nécessairement un excellent souvenir et beaucoup se souviennent qu'il fut l'un des rédacteurs importants, pour ne pas dire le maître d'oeuvre, de la fameuse réforme Juppé, qui s'est attiré la colère de nombreux fonctionnaires, mais aussi des médecins, inquiets des projets de maîtrise comptable des dépenses et du système de sanctions collectives envisagé alors pour les médecins en cas de dérapage des dépenses.
A l'heure où les comptes de l'assurance-maladie ne sont pas au mieux, où les dépenses sont sur une pente ascendante fort dangereuse, et alors que certains estiment que le comité d'alerte devrait se réunir pour arrêter de nouvelles mesures d'économies, la présence de Raymond Soubie près du président de la République inquiète des responsables du monde médical.
Dans un entretien avec « le Quotidien » en décembre 2004, Raymond Soubie le disait clairement : «Si (...) les dépenses dépassent l'Ondam de 0,75% et que la procédure d'alerte se déclenche, la réforme aura échoué. Il est évident que, au-delà de l'amélioration du système, la maîtrise médicalisée et les systèmes d'accès aux soins ont aussi un objectif financier.»
Le Plfss 2008.
Or, aujourd'hui, le scénario « catastrophe » décrit par Raymond Soubie en 2004 est bien près de se réaliser : l'augmentation des dépenses est plus forte que prévu et, dès avril, les membres du comité d'alerte sonnaient le tocsin. Un dérapage de 0,75 % de l'Ondam (« le Quotidien » du 15 mai) signifierait un dépassement de 1,1 milliard d'euros en 2007. Selon certains experts, le dérapage risquerait même d'être plus important. D'où des mesures de redressement qui sembleront indispensables. Elles regarderaient d'abord le nouveau ministre du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique, Eric Woerth, qui devrait tenter de trouver des solutions avec la ministre de la Santé, de la Jeunesse et des Sports, Roselyne Bachelot.
Mais alors que le président de la République, tout au long de sa campagne, n'a cessé d'appeler les Français à la rigueur et de les mettre en garde contre tout laxisme, il y a fort à parier que le conseiller social de l'Elysée regardera de près, de très près, les solutions et les mesures proposées. «Il est évident que l'Elysée ne permettra aucun laisser-aller», insiste encore un syndicaliste médical, quelque peu inquiet et qui ne voudrait pas que puissent être remises en cause les revalorisations de 2008. On n'en est pas là. Mais il est certain que la vigilance s'impose. A cet égard, la prochaine loi de financement de la Sécurité sociale qui sera présentée à l'automne au nouveau Parlement montrera les intentions du gouvernement en la matière et l'orientation choisie par le président de la République et son conseiller social.
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