JEAN-FRANçOIS DELFRAISSY (ANRS), Anthony Fauci (NIH) et Gary Nabel (Vaccine Research Center NIH) ont parlé d'une seule voix au congrès anniversaire pour les 25 ans du VIH à l'Institut Pasteur (Paris) : «En dépit des 70 à 80pistes vaccinales déjà testées, depuis une vingtaine d'années, pour lutter contre le VIH, aucune n'a permis d'obtenir de résultats significatifs. Il faut donc aujourd'hui se replonger dans la recherche fondamentale pour trouver de nouveaux angles afin de protéger les populations contre cette pandémie, qui ne peut être contenue par la voie thérapeutique.» Les cliniciens présents ont approuvé cette analyse.
Pour Malegapuru Makgoba (université du Kwazulu-Natal, Afrique du Sud) «à chaque fois qu'une personne a accès à un traitement antirétroviral, on recense trois nouvelles contaminations».
Comme l'explique Françoise Barré-Sinoussi, «ce n'est qu'en étudiant les zones d'ombre qui entourent encore les interactions entre le virus, les cellules de l'hôte et les mécanismes immunitaires déclenchés par l'infection que l'on pourra imaginer des pistes vaccinales innovantes. Différentes approches sont actuellement développées. Des travaux fondamentaux sont déjà en cours d'analyse sur les facteurs qui influent sur le développement d'une immunité et sur des modèles animaux pathogènes et non pathogènes, en particulier lors des phases précoces de contact entre l'hôte et le virus. D'autres chercheurs se sont plutôt focalisés sur la réponse immunitaire (en particulier TCDI+) des malades qui contrôlent leur charge virale plus de dix ans après avoir été infectés».
Aujourd'hui, des dizaines de candidats vaccins sont en cours d'étude préclinique. Comme le précise Anthony Fauci, «l'échec d'un essai vaccinal est aussi l'occasion de tirer des leçons et de faire progresser la science. Réexaminer sous un aspect de science fondamentale l'origine du manque d'efficacité peut permettre d'être plus exigeant sur les prochaines étapes cliniques». Les cibles des vaccins en développement sont multiples : il s'agit principalement de protéines d'enveloppe ou de protéines nucléaires virales combinées à des vecteurs.
Majoration du pouvoir immunogène de l'enveloppe.
Pour Gary Nable, «la prochaine génération de vaccins devra être fondée sur une majoration du pouvoir immunogène de l'enveloppe afin d'induire simultanément une réponse anticorps et une stimulation de l'immunité cellulaire. Mais la diversité génétique de cette enveloppe et les différentes stratégies mises en place par le virus pour échapper à l'immunité de l'hôte rendent cette piste vaccinale délicate. D'où l'idée de créer des vecteurs qui expriment des protéines de l'enveloppe variables associées à des régions fonctionnelles conservées par la plupart des souches virales. L'un des premiers candidats exprime gag, pol et nef des virus de cladeB associés à des protéines d'enveloppe de virus de cladesA, B etC. Actuellement en phaseII d'études cliniques, ce vaccin s'inscrit dans cette nouvelle génération qui pourrait produire des anticorps neutralisants tout en stimulant l'immunité cellulaire, ce qui lui permettrait de lutter contre un nombre important de sous-types viraux».
Mais il faudra encore être patient puisque les chercheurs estiment que le délai avant la mise au point à grande échelle d'un tel vaccin devrait prendre jusqu'à une dizaine d'années.
Une pandémie toujours d'actualité
En 2007, 33,2 millions de personnes étaient infectées par le VIH dans le monde, dont 2,5 millions de moins de 15 ans. Cette même année, 2,1 millions d'adultes et 420 000 enfants ont été contaminés (dont 1,7 million en Afrique subsaharienne), 1,7 million d'adultes et 380 000 enfants de moins de 15 ans sont décédés des suites de la maladie.
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