Journées francophones de pathologie digestive (SNFGE)
du 17-21 mars 2007 à Lyon
L'EMPLOI, à visée thérapeutique, de la plante dont est extrait le cannabis, Cannabis sativa L. ou chanvre indien, est très ancien puisqu'il remonte à plus de 4 000 ans (pour la prise en charge de la migraine, de la douleur ou des crampes musculaires, par exemple). Le composé principal de la marijuana extraite de la plante, le D-9-tétrahydrocannabinol (THC) agit sur des récepteurs spécifiques cannabinoïdes. Deux de ces récepteurs ont été identifiés, clonés et séquencés : les récepteurs CB1, ou centraux et CB2, ou périphériques.
Les récepteurs CB1 sont principalement exprimés au niveau du système nerveux central alors que les récepteurs CB2 sont essentiellement présents au niveau du système immunitaire périphérique, notamment dans le tube digestif. Ils moduleraient des processus variés, comme l'inflammation et la douleur.
Des ligands endogènes lipidiques.
La découverte de ces récepteurs endogènes au cannabis, qui est une substance exogène, a conduit à l'identification de ligands endogènes lipidiques appelés endocannabinoïdes. La connaissance de la physiologie des récepteurs permet de mieux comprendre les phénomènes de dépendance et d'addiction, mais aussi d'envisager de nouvelles pistes neuropsychopharmacologiques.
Au niveau de l'intestin, le rôle physiologique du récepteur CB2, qui est essentiellement exprimé par les cellules immunitaires, reste inconnu. Pour l'explorer, il est possible d'étudier l'expression des récepteurs CB2 par réaction de polymérisation en chaîne quantitative et par immunohistochimie sur des biopsies isolées obtenues chez des patients atteints ou non de maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (MICI). Cela permet de mieux comprendre le rôle physiopathologique des récepteurs CB2 chez ces patients. Par ailleurs, l'action préventive ou curative d'un ligand de ce récepteur, évaluée in vivo dans des modèles expérimentaux de colite, permet d'explorer l'implication du récepteur dans le contrôle de l'inflammation. Le rôle génétique du récepteur dans le contrôle de l'inflammation intestinale et la régulation des processus inflammatoires peuvent également être explorés avec des lignées cellulaires invalidées ou non pour le facteur de transcription NF-kB (Nuclear Factor kappa B »), qui régit de nombreux mécanismes cellulaires et qui est prépondérant dans les phénomènes inflammatoires. Les lignées cellulaires peuvent également être invalidées pour la kinase de stress Erk (Extracellular signal-Regulated Kinase).
Des pistes à explorer.
Au total, la transcription et la traduction du gène CB2 sont augmentées significativement dans les zones non inflammatoires de l'intestin des patients atteints de Maladie de Crohn. En revanche, cette augmentation n'est pas constatée chez les sujets atteints de rectocolite hémorragique.
Par ailleurs, la colite expérimentale peut être atténuée par l'administration préventive et curative d'un ligand, le FE-200859. L'effet du ligand s'exprime à un triple niveau, macroscopique, histologique et sur les marqueurs de l'inflammation intestinale.
Chez des souris invalidées pour le récepteur CB2, une colite expérimentale se développe sur un mode plus nécrosant, sévère et diffus, et l'atteinte est rapidement fatale, par comparaison avec des souris témoins. Enfin, la stimulation du récepteur par le ligand FE-200859 (découvert par Ferring Research et licencié à Cara Therapeutics) s'accompagne in vivo d'une diminution du recrutement de cellules immunitaires, et in vitro, de la production de chimiokines dans une lignée de macrophages. Ces effets du ligand peuvent être atténués par l'utilisation d'un antagoniste spécifique et puissant du récepteur CB2, le SR 144528.
Ainsi, l'activation du récepteur cannabinoïde CB2, périphérique, exerce un puissant effet anti-inflammatoire in vivo et in vitro. L'emploi d'agonistes sélectifs pourrait être envisagé en thérapeutique en raison de leurs effets sur la motricité, la douleur abdominale et sur l'inflammation chez les malades atteints de maladies inflammatoires chroniques intestinales (MICI).
Communication du Pr Pierre Desreumaux, hôpital Claude-Huriez, Lille.
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