EN MATIÈRE de chirurgie de l'obésité, les référentiels ne sont « pas fondus dans le bronze ». C'est du moins ce qu'espère le Dr Raymond Arnoux, de la polyclinique de Bordeaux-Tondu, après lecture des études de la Cnam diffusées récemment ( « le Quotidien » du 10 juin). Après avoir réuni la presse, le chirurgien s'est étonné que le nombre de patients ayant subi une intervention soit passé de 16 000 en 2002 à 10 000 en 2003 (ils n'étaient que 2 000 en 1995). « Il est très vraisemblable qu'après une période de croissance, tout n'ait pas été parfait, mais, dans ces proportions-là, c'est quand même étonnant », a-t-il dit, en demandant : « Est-ce que le fait d'avoir soustrait 6 000 patients de la procédure était un bienfait ? » Cependant, il a admis avec la Cnam que le suivi postopératoire des personnes qui avaient subi une chirurgie bariatrique était largement insuffisant, puisque « 97 % des patients ont revu leur chirurgien. En revanche, ils ne sont que 4 % à avoir un suivi médical pluridisciplinaire recommandé par l'Anaes* », selon la caisse.
Professionnels inquiets.
En réalité, il semblerait que les professionnels du secteur s'inquiètent de ce que l'on veuille encadrer leur discipline. En effet, le rapport de la Cnam mentionne explicitement la nécessité d'un cahier des charges « pour aboutir à un nombre plus réduit d'équipes, avec un environnement technique et des moyens humains adaptés, s'engageant sur une activité minimale annuelle, le respect des recommandations, un suivi organisé et offrant le choix des différentes techniques aux patients ».
Un programme qui peut faire craindre à certains une limitation de leur activité. C'est dans ce contexte que les membres de la polyclinique de Bordeaux-Tondu se sont adressés à la presse, en présentant leur équipe pluridisciplinaire (chirurgien, nutritionniste, psychologue) et en faisant valoir la qualité de leurs interventions - évaluation préopératoire, suivi pluridisciplinaire - dans l'intérêt de la chirurgie de l'obésité.
Ils ont insisté sur le fait que la perte de poids (par chirurgie) apportait un bénéfice supérieur à sa simple stabilisation (par suivi médical), y compris après pondération. « Même avec le risque de la chirurgie, on diminue de 80 % le risque de mort à cinq ans », a déclaré le Dr Arnoux en mentionnant une étude québécoise parue dans le « New England Journal of Medicine » en 2004, tout en précisant que « l'étude reste à confirmer, mais quand même »...
D'autres référentiels ?
Selon le Dr Arnoux, la Société française de chirurgie de l'obésité (Sofco) a mis en place une commission chargé de contacter la Haute Autorité de santé pour « élaborer des référentiels reconnus par la profession, pas forcément plus larges mais plus adaptés à la réalité : on ne va pas baisser les critères, mais mieux les choisir », a-t-il précisé. La Sofco est une association qui a pour but de « promouvoir le développement de la chirurgie de l'obésité par l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins ». Dans la pratique, les différentes techniques chirurgicales (anneau gastrique ajustable, gastroplastie verticale calibrée, by-pass gastrique) doivent être évaluées une par une car le recul n'est pas le même pour toutes : « Pour la gastroplastie, on n'a pas de recul sur plus de dix ans », explique le chirurgien.
Au final, il est difficile de savoir si cette opération de communication en faveur de la chirurgie de l'obésité traduit la volonté de se mettre sur les rangs dans la perspective d'une probable réduction du nombre d'équipes habilitées à opérer, ou témoigne d'un simple besoin d'informer patients et professionnels sur les bénéfices que l'on peut retirer de ces techniques - à condition qu'elles soient réalisées dans les meilleures conditions.
* Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé.
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