L'efficacité du tamoxifène en traitement des cancers du sein n'est plus à démontrer. En outre, il est parfaitement établi que, chez des femmes traitées pendant cinq ans pour un cancer du sein, le risque de cancer du sein controlatéral est diminué de 50 %.
Quatre études tentent aujourd'hui d'évaluer le bénéfice du traitement pour les patientes à risque, indemnes de cancer du sein. Les premières conclusions, publiées pour trois d'entre elles, ne sont pas homogènes. Si les résultats nord-américains mettent en évidence une réduction de 50 % de l'incidence du cancer du sein, les études européennes concluent à une incidence peu ou pas du tout diminuée. Les raisons d'une telle différence ne sont élucidées. Toutefois, une analyse combinée reprenant l'ensemble des données a permis d'estimer la réduction du risque entre 30 et 40 %. La question qui demeure irrésolue reste celle-ci : « Ce bénéfice est-il suffisant pour contrebalancer les effets secondaires du traitement : augmentation des symptômes de la ménopause, accidents thromboemboliques, anomalies et cancer de l'endomètre. » Selon le Pr J. Cuzick et coll., qui rapportent dans le « Lancet » les résultats d'une de ces études, IBIS-1, la réponse à cette question est importante car d'autres antiestrogènes pourraient être utilisés dans cette indication.
Un risque thromboembolique
L'étude internationale IBIS-1 a donc été conduite entre avril 1992 et mars 2001 et a inclus 7 152 patientes âgées de 35 à 70 ans. Après tirage au sort, 3 574 ont reçu du tamoxifène, 20 mg/j pendant cinq ans, les 3 578 autres un placebo. Les patientes avaient toutes une histoire familiale de cancer du sein, avec un risque relatif élevé. Elles avaient toutes une espérance de vie estimée à plus de dix ans, n'avaient pas d'antécédent thromboembolique (veines profondes ou pulmonaires), ni de traitement anticoagulant. Tout risque de grossesse pendant la durée de l'étude a été écarté, de même qu'un cancer évolutif (13 femmes ont été exclues après mammographie à l'entrée).
Après un suivi de cinquante mois, en moyenne, l'analyse a donc mis en évidence une incidence moindre des cancers du sein positifs pour les récepteurs hormonaux dans le groupe tamoxifène (n = 69) que dans le groupe témoin (n = 101). Cette réduction du risque de 32 % a été observée quels que soient l'âge, le degré du risque, la présence ou non d'une hormonothérapie substitutive. Le nombre de cancer de l'endomètre a été deux fois plus important dans le groupe traité, mais la différence n'était pas significative. Tous les cancers détectés l'ont été chez les femmes ménopausées et aucun lien avec un éventuel traitement hormonal substitutif n'a pu être démontré.
Le risque thromboembolique était plus élevé dans le groupe tamoxifène, la plupart des événements survenant dans les trois mois suivant une intervention chirurgicale ou après une longue période d'immobilisation. Ces résultats étaient attendus, ce qui l'était moins, « c'est l'augmentation de la mortalité (toutes causes confondues) dans le groupe traité par rapport au groupe témoin, le risque thromboembolique étant sans doute en cause ». Le rapport bénéfice/risque du tamoxifène en prévention reste à démontrer.
« Lancet », vol. 360, 14 septembre 2002, pp. 817-824.
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