LE QUOTIDIEN - La campagne du Parti socialiste, lors de ce scrutin européen, met l'accent sur la nécessité de bâtir l'Europe sociale. Et la santé ?
Dr CLAUDE PIGEMENT - Elle est tout aussi importante, évidemment.
Mais reconnaissez que, dans le domaine social, l'Europe a bien des lacunes, de grosses lacunes. C'est pourquoi nous en avons fait le thème central de notre campagne en préconisant la mise en place d'un salaire minimal européen, une coordination des politiques sociales, la défense de l'emploi et des droits sociaux : autant de domaines qui nous semblent urgents en effet d'améliorer au niveau européen. L'Union ne doit pas être seulement économique : elle doit être sociale.
Cela rejoint d'ailleurs la santé, puisque la mise en place d'une politique sociale passe en particulier par la défense de l'hôpital public.
Le Parlement européen, dans le domaine sanitaire, au cours de la dernière législature, s'est surtout préoccupé de la santé publique.
En effet, et il faudra sans aucun doute poursuivre dans cette voie. Santé publique et prévention doivent figurer en tête des préoccupations des autorités européennes et du Parlement de Strasbourg. Il est tout à fait remarquable que les Etats se soient entendus sur une politique de prévention du tabagisme, en inscrivant notamment sur les paquets de cigarettes des avertissements mettant en garde l'ensemble des consommateurs européens sur les dangers du tabac. De même, l'Europe s'est largement retrouvée autour du problème de la sécurité sanitaire. Des innovations sont également à saluer, comme la mise en place de la carte européenne d'assurance-maladie qui sera valable dans tous les pays de l'Union et même au-delà. Autre acquis de l'Europe : la libre circulation des professionnels de santé.
On peut regretter cependant que le domaine de la protection sociale ne soit pas concerné par cette politique européenne.
Mais autant nous pensons qu'il faut mettre en place une politique commune de santé publique, autant il ne nous semble pas opportun que les politiques de protection sociale soient concernées. Il y a trop de différences entre les pays. Cela risquerait de créer plus de problèmes que de solutions.
Ce qui signifie que l'on ne peut pas, pour l'instant, décider de politiques communes de maîtrise des dépenses, alors que tous les Etats européens sont confrontés à des problèmes de déficits.
Nous pensons que l'élaboration de schémas de maîtrise médicalisée doit être assumée par les Etats dans le cadre des politiques de santé et de protection sociale. Mais il revient à chaque pays de décider de ses propres recettes et de ses remèdes.
C'est-à-dire que l'on ne pourrait pas, par exemple, appliquer en France la réforme allemande ?
Absolument pas. Comme il serait tout aussi maladroit pour le moins de transposer une réforme britannique. Les Etats et les gouvernements dans ce domaine doivent rester maîtres de leurs réformes.
Enfin, un mot sur le médicament qui a été l'objet de bien des textes lors de la précédente législature.
A noter d'abord toute l'importance de l'Agence européenne du médicament qui a un rôle de plus en plus important à jouer et qui le joue. Les textes sur le médicament ont été essentiels, qu'il s'agisse de l'abaissement de la protection des brevets, de l'allégement des procédures d'AMM, ou du vote des députés s'opposant à un texte qui aurait permis aux laboratoires de communiquer directement aux patients leurs propres informations concernant ces trois maladies que sont le sida, l'asthme ou le diabète. Le Parlement a montré en l'occurrence toute l'importance de son rôle.
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